La meilleure façon de démarrer le le e-learning dans l’entreprise… c’est de procéder a minima ! Il faut en effet que cette démarche réponde à une vraie problématique de l’entreprise ou de l’un de ses départements. Idéalement, il faudrait même aller au-delà, en s’assurant que l’objectif poursuivi par cette introduction du e-learning est bien aligné sur la stratégie de l’entreprise. La première condition garantit que le public sera au rendez-vous et qu’un ROI, même sommaire, pourra être présenté. La seconde débouche sur la promesse d’un développement du e-learning s’étendant au-delà d’une simple action isolée, et débouchant sur une vraie stratégie de formation.
Du coup la question posée est celle du choix des premiers projets à « e-learniser »… Impossible ici de faire l’économie d’une analyse approfondie des besoins de formation, qui permettra au Responsable e-learning de prendre en compte les impératifs de formation, comme la nature et la maturité technologique du public à former, les ressources documentaires et humaines existantes, l’éventuelle articulation avec d’autres modalités de formation… Principe à respecter, quel que soit le résultat de cette analyse, et compte tenu des moyens à mobiliser : tout mettre en œuvre pour convaincre les sponsors du projet ! Ce qui passe par la preuve des « quick wins » tirés du e-learning, à travers notamment des mesures objectives qui donneront plus de latitude au Responsable e-learning pour pérenniser et développer sa stratégie.
C’est à lui qu’il appartient en effet de choisir les KPIs (NDLR : Key Performance Indicators, indicateurs clés de performance) à même de suivre les progrès de sa stratégie. Si l’objectif poursuivi est plutôt « bottom-up » (par exemple celui d’une pénétration de la cible d’utilisateurs), les taux et fréquences de connexion à la plateforme LMS, la mesure de la satisfaction, affinés si nécessaire selon les différentes populations-cibles, peuvent s’entendre. Si la stratégie réside plutôt dans la vente de la solution e-learning auprès des différents départements de l’entreprise, en particulier pour se rallier des donneurs d’ordre qui demanderont la réalisation de modules (dont ils « arroseront » un public de plus en plus large, dans le cadre d’une stratégie descendante), alors la croissance du patrimoine de modules e-learning ou bien un ROI seront de meilleurs indicateurs. Compte tenu du coût élevé des modules e-learning, il faut décider ce qui sera produit en interne ou sous-traité. Une question qui dépend des ressources documentaires et humaines existantes, du nombre et de l’urgence business des projets, du nombre de projets à mener de front, de la dépendance plus ou moins grande aux budgets d’autres départements, etc. Même les tenants de la production interne reconnaissent toutefois que l’émergence des différents outils mobiles (Smartphones, tablettes) associés à des normes qui évoluent (Scorm ou TinCan ? Flash ou html5 ?), des nouveaux médias (blogs, forums, vidéos...) accélère l’obsolescence des savoirs du Département e-learning… On convient en général du bien-fondé d'une approche mixte de la production de contenus… en prenant en compte la nécessité de faire évoluer les contenus déjà développés au rythme de l’innovation de votre R&D (contenus liés à des produits), des changements réglementaires (compliance, santé, etc.), ou encore, par exemple, de la stratégie de votre entreprise ! Assurez-vous, lors de la négociation avec une agence de création, que vous possédez bien les droits et fichiers sources des contenus créés… sous peine de devoir tout recréer quelques mois plus tard, au prix fort ! Autre question clé : celle de la plateforme LMS. Là où elle était la pierre angulaire du dispositif à l’époque où seuls les modules e-learning existaient, la multiplication des sources de formation digitale (Apps, blogs, forums sur les intranets) morcelle aujourd’hui l’univers de l’apprenant… et la toute puissance du LMS. Ce n’est que la reproduction de ce qu’on constate dans la sphère privée, où chacun va aller au gré de ses besoins de connaissance sur YouTube, faire une recherche Google, qui va à son tour rediriger sur un forum spécialisé, qui lui-même va pointer vers un blog… On comprend pourquoi les LMS tentent d’évoluer en intégrant ces univers vidéo, social learning, visioconférences et autres : il s’agit pour eux d'encapsuler ces modalités et d'offrir à l’utilisateur un point d’accès unique à une "bibliothèque" diversifiée. Ce qui n’empêche que la formation continue d’avoir besoin de « tracking » et de mesure de la rétention de la connaissance : le LMS reste à ce jour incontournable. Pour terminer ce rapide tour d’horizon, il nous fait évoquer le principal obstacle dressé devant le e-learning : la réticence de l’utilisateur final, à qui il serait injuste de jeter la pierre : beaucoup de modules sont en effet déconnectés des besoins réels et des attentes de l’apprenant ! Mettez-nous à sa place : quelle serait notre attitude, à la recherche d’une information sur le Web, si on ne la trouvait pas au bout de 10 minutes passées sur un même site ?! Produire des contenus pertinents ne s’improvise pas, gérer un projet de création de contenu pas plus. Le risque de frustration de l’apprenant est important, s’il ne trouve pas dans ces contenus l’opportunité d’acquérir ou de mettre en œuvre les connaissances attendues… Effet domino garanti : l’apprenant s’interroge sur la pertinence du e-learning, et finit par entraîner la réticence des sponsors internes et, de loin en loin, celle des autres parties prenantes. On entre alors dans le cercle vicieux d’un e-learning qui n’est plus vraiment une évidence dynamique mais une modalité qui se contente de survivre.
Mais on retiendra ce nouveau souffle qu’apporte les récentes modalités d’apprentissage : on passe du e-learning à une vision et des dispositifs plus larges, plus ouverts… Le Digital Learning frappe à la porte de nos entreprises… Une chance à saisir !
Xavier Voilquin
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