Il faut voir l’air déconfit d’un manager ou d’un salarié, voire du responsable formation, emporté dans ce jargon diluvien… e-learning, rapid learning, rich media, video learning, blended learning, e-formation, hybrid learning, digital learning, LMS, MOOC, social learning, story board, gameplay, apprentissages mobiles, outils auteurs, assessment, Serious Games, 70-20-10… Un court extrait des fantaisies qu’on se donne, car le secteur déborde de créativité sémantique !
Premier constat : les professionnels ont parfois eux-mêmes du mal à se comprendre ! Ce qui sera par exemple un « parcours » pour un éditeur de LMS deviendra une « ressource » chez un autre ; une « permission » ici devient un « droit » ailleurs, etc. Encore les vrais experts (souvent les plus lumineux dans leurs explications) parviennent-ils à s’entendre rapidement : ils partagent un savoir, des concepts qui leur permettent une traduction dans les deux sens !
Deuxième constat : rares sont les départements formation qui ont fait l’effort d’élaborer un glossaire du e-learning pour faciliter la communication avec les métiers et les salariés sur les nouveaux dispositifs qu’ils mettent en oeuvre. C’est dommage. D’abord définir les 10 à 15 principaux termes à partager avec les clients internes ou externes, c’est un exercice qui oblige la Formation à s’assurer… qu’elle a bien compris les objets et les concepts qui vont supporter tout l’édifice ! Ensuite, comme il n’est pas question de produire un long dictionnaire que personne ne lira (un défaut fréquent des dictionnaires du e-learning qu’on trouve sur le Web), elle exclure un certain nombre d’entre eux : une décision qui, mine de rien, est déjà d’ordre stratégique, car elle dessine un dispositif et des choix adaptés au contexte et à la culture de l’entreprise. Une sorte de maïeutique, donc, que la Formation s’administre à elle-même.
Les avantages du glossaire s’étendent bien sûr très au-delà. Nous le disions : il est un outil de communication avec les métiers et les salariés, utile à la conduite du changement (qui est largement affaire de pédagogie), utile au marketing de la formation : il s’agit qu’au moins mes clients sachent ce que je leur vends ! Et l’articulation entre glossaire et conduite du changement peut être approfondie : si celle-ci, comme il se devrait, n’est pas initiée après le lancement d’un dispositif e-learning, mais au contraire en amont, à un moment où les parties prenantes ont encore la faculté d’influer sur le design du dispositif, l’élaboration en commun du glossaire est une belle occasion de forger une culture commune du e-learning (de ses enjeux, problématiques, etc.).
Signalons deux autres avantages : mieux vaut disposer d’un dictionnaire interne du e-learning, adapté à l’entreprise, si l’on ne veut pas se voir imposer les dictionnaires de ses différents fournisseurs. Et puis, à l’instar du Dictionnaire de l’Académie, vous mettrez votre glossaire e-learning régulièrement à jour (une fois par an, par exemple) : sorties de terme qui n’y ont plus leur place, nouvelles entrées - une responsabilité toute trouvée pour la fonction veille et curation que les départements formation finiront bien par créer !
Michel Diaz
Tribune initialement parue dans Formaguide
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