Rencontre avec Philippe Delanghe, Directeur général d'UnI Learning France, l'un des tout premiers acteurs européens des contenus e-learning, curieux et passionné des usages qu'entreprises et salariés peuvent faire des nouvelles technologies appliquées à la formation… |
Quel est l'impact, sur le e-learning, des progrès de la technologique…
Philippe Delanghe : Les révolutions numériques en cours - mobilité, vitesse, cloud, partage - ont un profond impact aussi bien sur l'idée que nous nous faisons de l'ergonomie des modules e-learning qui doit "se faire oublier" pour que les consommateurs de formation puissent se concentrer sur l'essentiel, à savoir le contenu, les messages à retenir, que sur notre vision des dispositifs de formation… Il nous arrive par exemple de plus en plus souvent de découper les contenus en épisodes écourtés et de les accompagner par du tutorat ou de les intégrer dans un réseau social d'apprentissage… Nous avons également commencé à collaborer sur les projets avec nos clients dans le cadre d'un réseau Yammer… Donc, ça bouge beaucoup en ce moment !
En quoi ces transformations répondent-elles aux attentes des entreprises ?
Philippe Delanghe : Les entreprises restent à la recherche du "mieux pour moins cher"… Bien que le ROI (retour sur investissement) soit excellent, le e-learning "classique" continue de leur apparaître d'un coût élevé.
Les nouveaux outils permettent de construire des solutions blended learning plus riches, en intégrant par exemple des composants "micro learning" qui vont doper l’efficacité du parcours pédagogique pour un coût marginal minime. Cela permet de mieux répartir les investissements en les concentrant notamment sur la partie du parcours de formation qui le nécessiterait particulièrement. Pour ce faire, nous disposons d'un générateur de micro learning fondé sur le système de Leitner… Ce qui ne nous empêche pas de développer par ailleurs des serious games plus complexes simulant sur tablette des comportements humains ou l'utilisation d’outils informatiques !
Quant aux attentes des salariés, il suffit d'observer ce qui se passe avec les étudiants… Ils seront toujours plus friands de parcours de formation leur permettant de "zapper" ce qu’ils savent déjà et intégrant une dimension ludique / challenge devenue un puissant moteur de motivation. Croyez-vous à l'émergence d'acteurs du e-learning spécialisés sur des grands secteurs d'activité ?
Philippe Delanghe : Les métiers et les modèles économiques du "sur-mesure" et du "sur-étagère" diffèrent profondément, à l'instar de ceux éditeurs de logiciel et de sociétés de services informatiques…
Il n'en reste pas moins vrai que des clients d'un même secteur d'activité ont souvent des demandes très proches sinon identiques : nous n'hésitons pas à proposer une démarche de mutualisation visant à réduire les coûts quand c'est possible. C'est vrai, par exemple, dans le secteur des sciences de la vie où nous réalisons plus de 25% de notre chiffre d'affaires… Cette position unique nous permet d'identifier ce qui pourrait servir efficacement tous les acteurs de ce secteur, comme en témoignent les modules sur étagère que nous allons prochainement lancer… Mais comme le sur-mesure est inscrit dans notre ADN, il sera possible de personnaliser ces contenus !
Quels progrès restent à faire ?
Philippe Delanghe : L’amélioration est un processus continu supporté par les progrès de la technologie. En attendant les implants cérébraux pour nous connecter directement sur le cloud (prévus par Kurzweil pour 2040…), la banalisation de celui-ci offre un bouquet de services de plus en plus riche aux entreprises, sans investissements démesurés. Je crois beaucoup à la segmentation du marché d'une part vers le social learning et la production massive de ressources en ligne bon marché, et d'autre part vers des serious games ou simulateurs toujours plus puissants. Mais la résistance au changement et le défaut de vision stratégique sur l’utilisation du e-learning sont des freins autrement plus redoutables que les contraintes techniques.
Quelques conseils pour les entreprises ?
Philippe Delanghe : D'abord trouver un sponsor de haut niveau dans l’organisation, avec une une vision globale du sujet, pour débloquer des budgets significatifs - la formation servant, certes, à faire monter les salariés en compétence, mais avec l'objectif de résoudre les problèmes de l'entreprise et d'accompagner son développement
Ensuite mettre en place une vraie direction de projet quand on développe, s’assurer de la disponibilité des experts, et prévoir un échéancier réaliste tant du point de vue interne que du prestataire.
Responsabiliser les apprenants sur leur parcours de formation est aussi un impératif, leur donner les moyens d’être autonomes (ce qui ne veut pas dire qu’on ne vérifie pas ce qu’ils font) et ne pas oublier qu’on développe le module pour eux.
Tester les nouvelles approches : aujourd’hui tout le monde achète en ligne, regarde des vidéos sur internet et utilise les réseaux sociaux… L’entreprise ne doit pas accumuler du retard sur des pratiques numériques largement adoptées dans la sphère privée !
Regarder ce qui se passe dans le monde universitaire avec les MOOC, qui sont en train de modifier radicalement les stratégies numériques des grandes écoles et universités…
Et bien sûr choisir des prestataires expérimentés et capables de les accompagner, au-delà des aspects techniques et pédagogiques, sur la définition de la stratégie, le déploiement et la promotion en interne des modules, la fidélisation des apprenants…
Philippe Delanghe
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