D'abord, on se pose la question du « quoi ? » ! Qu’évalue-t-on ? Oublions un instant, si vous le voulez bien, le sempiternel modèle de Kirkpatrick qui, bien qu’il ait proposé une grille de lecture simple et pertinente sur les niveaux d’évaluation, laisse tout de même beaucoup d’interrogations sur le comment. Qui s’intéresse à l’évaluation s'aperçoit de l’adhésion que ce sujet suscite ; mais, si l’intérêt est fortement marqué, la difficulté survient rapidement sur « comment évaluer ? ». Avançons : répondre à cette question suppose qu’on se soit préalablement demandé : « pourquoi on évalue ? ».
On pense immédiatement à mesurer l’efficacité de l’action de formation. Aux yeux de l’apprenant et des commanditaires, la formation a-t-elle atteint ses objectifs ; sinon, quelles sont les lacunes à combler, quels aspects pourraient être améliorés. Un programme de formation n’est pas un livre : c’est un « objet » évolutif qui doit s’ancrer dans un processus d’amélioration continue. La sanction encourue par une formation qui se serait figée est sans appel : devenue has been pour les apprenants, comment pourrait-elle motiver plus longtemps les formateurs qui l’animent.
Évaluation formative, évaluation sommative
Un autre point d’importance : l’évaluation en formation, c’est avant tout l’évaluation que l’on intègre en cours de formation ainsi qu’à l’issue du parcours pédagogique. Ces deux phases doivent être appréhendées dans une optique différente. Si l’évaluation en cours de formation est souvent bien maîtrisée par les formateurs, en salle, en Visio ou dans des modules e-learning, c’est moins vrai des évaluations de fin de parcours. Parce que ce qui doit alors être évalué n’est pas toujours si clair… La plupart du temps, l’évaluation finale (aussi dite « évaluation sommative ») est réalisée à l’issue du processus de conception du contenu de formation, tandis qu'elle devrait être la première étape de l’élaboration d’un contenu de formation ! En effet, si je sais comment évaluer que j’aurais bien atteint l’objectif de ma formation, alors l’élaboration du chemin qui mène à cet objectif m’en sera facilitée. Pourtant, cette pratique, qui consiste à renverser sa façon de concevoir les évaluations, n'est pas assez usitée, ce que peu de formateurs ne pourraient contester. Construire les évaluations à l’issue du processus de production des contenus, c’est introduire un biais : la tentation sera d’évaluer la rétention des éléments fournis dans les contenus, plus que l’aptitude opérationnelle visée par la formation.
Se concentrer sur les niveaux 3 et 4 de la Pyramide de Miller
Les 4 étages de la pyramide de Miller éclairent cette question. Le premier niveau, le « Knows », pose la question : qu'est-ce que l’apprenant sait ? Le deuxième, « Knows how » : l’apprenant sait-il pourquoi et comment faire ? Si l’on se limite à créer l’évaluation après les contenus, on se limite en général à une évaluation de ces deux niveaux, qui fait l’impasse sur les deux autres niveaux, davantage tournés vers l’aptitude opérationnelle. Le « Shows » (3ᵉ niveau) - l’apprenant sait-il expliquer à un tiers comment faire ? - et le « Does » (4ᵉ niveau) qui évalue si l’apprenant sait faire.
Le Shows et le Does relèvent moins de l’ingénierie pédagogique classique que de « l’ingénierie de certification ». Ils s’inscrivent dans une tendance de fond de l’évaluation et de la certification des compétences, un domaine dont la France est un des leaders européens avec le projet du passeport de compétences, car on ne peut pas enlever à France Compétences son sérieux en matière d’évaluation des compétences, même si l’on décrie parfois la lourdeur administrative de son approche. En particulier, elle joue un rôle moteur en incitant les organismes de formations, et par conséquent tous les acteurs de formation, à basculer d’une ingénierie classique à une ingénierie de certification.
En se concentrant sur les niveaux 3 et 4 de la pyramide de Miller, on induit de fait une nouvelle approche de l’évaluation plus opérationnelle, plus métier, apportant davantage de valeur aux formés comme aux commanditaires des formations qui, notamment via les certifications obtenues, disposent d’une meilleure cartographie des compétences acquises.
Les équipes de l’ISTF le constatent depuis plusieurs années : nos formations, qui aident les départements formation et les organismes formations à intégrer l’ingénierie de certification et l’évaluation des aptitudes opérationnelles dans leurs offres, connaissent une accélération exponentielle. Il s'agit sûrement là d’une tendance de long terme.
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