La réforme de la formation inquiète les OPCA. La fin de l’obligation fiscale devrait réduire leur surface financière. Mais elle leur offre également de belles opportunités de développement. Leur défi n’est pas mince : changer de logique et passer d’un rôle de financeur à celui de conseiller et de prestataire de services à haute valeur ajoutée.
Fin de l’obligation fiscale, oui mais pas seulement…
Le texte de la loi du 5 mars 2014 fait, au final, assez peu référence aux OPCA. Hormis les articles dédiés aux nouvelles répartitions de l’obligation conventionnelles, deux articles seulement les concernent directement. L’article L.6316-1 les invite à intervenir dans le contrôle de la qualité de l’offre de formation et l’article L.6332-1-2 leur offre la possibilité de percevoir des « contributions supplémentaires ayant pour objet le développement de la formation professionnelle continue ».
Ces deux articles beaucoup moins “médiatisés“ que la fin de l’obligation fiscale sont pourtant d’une extrême importance. Le premier leur donne la possibilité de refuser le financement d’une action sur des critères de qualité et non plus seulement administratifs. Le second leur permet de financer des prestations autres que la seule formation. Cela peut être des études, des prestations de conseil et de gestion, etc.
Ces deux articles ouvrent le jeu des OPCA. Ils ne sont plus confinés au seul rôle de financeur d’actions de formation. Ils peuvent investir le champ des services auprès des différents acteurs de la formation.
Des nouveaux services à proposer
Ni le législateur, ni le négociateur n’ont spécifié ces services. Il revient aux OPCA de les inventer. A eux de se mettre au marketing des services et écouter les besoins de leurs clients. Ceux des entreprises adhérentes évidemment, mais également toutes les parties prenantes de l’éco-système de formation : les branches professionnelles, les salariés, les organismes de formation, Pôle emploi, les Régions… Tout est à créer. Si quelques OPCA ont investi depuis longtemps la délégation de paiement et plus récemment l’offre d’actions collectives, la simplification des processus de gestion avec les Extranets, ou encore la veille, le sujet est loin d’être épuisé.
Citons pêle-mêle quelques pistes :
- Référencement d’organismes de formation,
- Centrale d’achats,
- Généralisation des actions collectives,
- Mutualisation des investissements en R&D pédagogique,
- Développement d’une ingénierie de certification en appui des CPNE,
- Mise en place de SI Formation délégués,
- Délégation de la gestion du 0,2% CPF et du plan de formation au delà de la contribution conventionnelle avec service associé,
- Montage de partenariats Régions / Pôle emploi / inter OPCA en vue d’offrir des prestations de co-financement originales,
- Conseil auprès de salariés pour le montage de projet de formation notamment en CPF et plus globalement pour la définition de son projet professionnel (en complément du CEP)
- Etc.
Et si les OPCA devenaient la plaque tournante ?
Passant d’un rôle de financeur à un rôle de conseil auprès de toutes les parties prenantes de la formation, les OPCA pourraient détenir les clés de la réussite de la réforme : invention de nouveaux services, accompagnement efficace des entreprises mais également des salariés et des organismes de formation. La loi du 5 mars 2014 pourrait changer en profondeur les pratiques de formation. A contrario ils restent arc-boutés sur une logique financière sans proposer de services à haute valeur ajoutée, et la réforme échouera.
Concrètement, les OPCA peuvent devenir la plaque tournante de l’éco-système de formation à condition d’intervenir efficacement autour de 5 axes majeurs :
• L’optimisation des coûts, • L’innovation pédagogique, • La simplification de la gestion, • L’aide au montage de projets de formation orientés vers l’employabilité, • L’ingénierie de partenariats financiers pour la sécurisation de l’emploi.
Les OPCA détiennent les clés de la réforme de 2014, et de leur propre avenir. Ils échouent et la prochaine réforme les conduira à fusionner, voire pire à être démantelés et répartis entre Pôle emploi et les FONGECIF. Ils réussissent et c’est eux qui intégreront les FONGECIF offrant l’ensemble de la palette de services aux entreprises, mais également aux salariés et peut-être même aux demandeurs d’emploi, si entre temps le CPF devient le dispositif unique du droit à la formation individuelle.
Marc Dennery
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