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L'OPCO EP à la croisée des chemins : entre consolidation attendue et défis persistants
18 MARS 2025 / dispositifs
Face à des vagues successives de réformes, l'Opérateur de compétences des entreprises de proximité (OPCO EP) peine encore à atteindre sa vitesse de croisière, cinq ans après sa création en 2019. Si l'organisme a su relever le défi de l'apprentissage dans un contexte de croissance exceptionnelle, la Cour des comptes pointe du doigt diverses zones d'ombre dans un rapport brûlant : des dépenses de conseil excessives, des entorses graves aux règles de la commande publique, une transformation inachevée. Plongée dans les coulisses d'un opérateur sous pression, à l'heure des choix stratégiques.

Le directeur d'un organisme de formation spécialisé dans la coiffure observe avec perplexité les multiples intervenants qui gravitent autour de l'OPCO EP. « On ne sait jamais qui appeler. Tantôt c'est un conseiller en chair et en os, tantôt une plateforme téléphonique, parfois un consultant externe. Chacun semble avoir sa propre vision des règles. » Cette impression de flottement n'est pas anodine. Elle illustre les difficultés d'un opérateur toujours en transformation, pris dans un entre-deux qui commence à s'éterniser. L'OPCO EP n'est pourtant pas n'importe quel acteur du paysage de la formation professionnelle. Avec plus de 434 000 entreprises adhérentes et 2,4 millions de salariés couverts, il constitue l'épine dorsale du système pour former les artisans, commerçants et autres entreprises de proximité. Un mastodonte au budget colossal de 2,4 milliards d'euros qui, paradoxalement, peine à finaliser sa mue.

« L’OPCO a recouru, de façon massive et ininterrompue, aux prestations intellectuelles réalisées par un cabinet de conseil »

Le rapport de la Cour des comptes, rendu public en 2024, est sans appel. L'institution dénonce « un recours massif et coûteux à la sous-traitance extérieure » pour un montant faramineux de près de 7 millions d'euros sur quatre ans (2020-2023). Des prestations qui auraient pu – et dû – être assurées en interne, selon les magistrats financiers, l'OPCO disposant de plus de 1 100 collaborateurs aux « profils variés » et de « services correspondant à l'exercice de l'ensemble de ses missions ».

Cette dépendance à un prestataire externe cristallise les tensions internes. Plusieurs responsables importants ont quitté l'organisme en signe de désapprobation. Le conseil d'administration lui-même n'aurait pas été correctement informé de cette omniprésence, créant un malaise institutionnel certain. 

Une directrice de formation d'une TPE du bâtiment s'étonne : « On nous parle de dématérialisation, d'amélioration des processus, mais dans les faits, j'ai l'impression que l'OPCO peine à s'organiser lui-même. Comment peut-il nous accompagner efficacement dans ce cas ? ».

Des entorses graves aux règles de la commande publique

Les failles ne s'arrêtent pas là. La Cour pointe également du doigt un manquement grave : l'OPCO EP « ne respecte pas toutes les obligations du Code de la commande publique », ce qui l'expose à « des risques juridiques sérieux ». Achats informatiques, travaux immobiliers, prestations intellectuelles… de multiples domaines sont concernés. Cinq ans après sa création, l'organisme n'a toujours pas mis en place les procédures adéquates pour respecter ces règles fondamentales.

La gouvernance de l'opérateur apparaît aussi comme un nœud gordien. Avec pas moins de 58 instances mobilisant plus de 1.000 administrateurs, le système est décrit comme « lourd » et coûteux (5,5 millions d'euros en 2022). Les 33 sections paritaires professionnelles, censées représenter les branches, fonctionnent trop souvent en silos, freinant la mutualisation pourtant essentielle à un fonctionnement optimisé.

Un responsable formation d'une branche professionnelle témoigne : « Les réunions s'enchaînent, les débats sont interminables, mais les décisions concrètes tardent à venir. On passe plus de temps à discuter de la gouvernance qu'à travailler sur le fond. »

Des succès indéniables malgré les dysfonctionnements

Malgré ces dysfonctionnements, l'OPCO EP a su relever certains défis majeurs. Face à l'explosion du nombre d'apprentis, l'opérateur a réussi à fluidifier le traitement des dossiers, passant de 20 jours en 2020 à seulement 4 jours en 2021. Une performance qui a conduit l'État à lui confier la mission « apprentis sans contrat » – ces jeunes en formation sans employeur.

Le taux d'accès à la formation des TPE-PME est également au rendez-vous, dépassant largement les objectifs fixés. Mais la Cour souligne que ces résultats bénéficient de facteurs externes favorables, notamment les fonds abondants alloués au plan de développement des compétences et la dynamique particulière de l'apprentissage pendant la période post-Covid.

Un tournant critique pour l'avenir de l'organisme

L'organisme se trouve aujourd'hui face à un tournant critique. D'un côté, ses ressources financières ont été revues à la baisse en 2022, sa part dans la répartition des fonds du plan de développement des compétences passant de 31 % à 22 %. De l'autre, il dispose encore d'importantes réserves, notamment en matière de contributions conventionnelles, avec des fonds propres représentant près de quatre années de collecte en 2022.

Les défis restent nombreux. La « bascule » tant attendue des ressources humaines de la gestion vers le conseil n'a toujours pas abouti. Le nombre d'assistants de gestion n'a pas suffisamment diminué pour permettre un renforcement significatif des équipes de conseil aux entreprises. La convergence des systèmes d'information reste inachevée. Le modèle d'organisation territoriale demeure en chantier.

Pour les responsables formation, cette situation crée un inconfort certain. « On a besoin d'un OPCO solide, aux règles claires et à l'organisation stable », confie le directeur d'un CFA parisien. « Nous sommes en première ligne face aux entreprises et aux apprentis. Comment pouvons-nous les rassurer quand nous-mêmes, naviguons dans le brouillard ? »

Sept recommandations pour redresser la barre

La Cour des comptes formule sans détour sept recommandations pour redresser la barre, dont la plus urgente – formulée comme un « rappel du droit » – concerne l'application immédiate des règles de la commande publique. Elle préconise également de mettre fin sans délai au recours récurrent aux sociétés de conseil, d'intensifier l'accompagnement des entreprises et de réduire le nombre de sections paritaires monobranches pour favoriser la mutualisation.

La situation est paradoxale : d'un côté, l'OPCO EP a montré sa capacité à gérer efficacement des flux massifs de contrats d'alternance ; de l'autre, il peine à finaliser sa propre organisation interne. Les enjeux sont cruciaux pour l'ensemble de l'écosystème de la formation professionnelle des TPE-PME, à l'heure où les besoins en compétences n'ont jamais été aussi pressants.

L'avenir dira si l'opérateur saura mettre fin à ce qui ressemble à une adolescence prolongée pour entrer définitivement dans l'âge de la maturité institutionnelle. Une chose est certaine : le temps des transformations perpétuelles doit céder la place à celui de l'efficience stabilisée. Les entreprises de proximité et leurs salariés le méritent bien.

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