ELEARNINGLETTER
ACTUALITE & STRATEGIES DIGITAL LEARNING
ACTUALITÉS ÉVÉNEMENTS OFFRES D'EMPLOIS COMMUNIQUÉS ANNUAIRE DES PREMIUM CONTRIBUTEURS S'ABONNER À LA NEWSLETTER
Mesurer son impact pour mieux valoriser la formation : vers un nouvel équilibre pour les départements L&D
14 OCTOBRE 2024
Jean-Roch Houllier
head of operations, learning & digital
groupe safran
Xavier Voilquin
director training operations emea
medtronic
Impact (et qualité) des formations… Pour les départements Learning & Development (L&D), le sujet est prioritaire. Face à la pression croissante des opérationnels qui attendent des résultats tangibles et mesurables, comment la formation peut-elle démontrer son rôle dans l’amélioration des performances en entreprise ? Jean-Roch Houllier (Safran) et Xavier Voilquin (Medtronic) explorent les défis et les évolutions nécessaires pour transformer la formation en un véritable levier de performance, intégrant l'analyse d'impact et la contextualisation des compétences. Entre personnalisation, digitalisation et « data literacy », cette évolution des indicateurs ouvre la voie à une nouvelle relation entre la formation, le business et la gestion des talents.

De la qualité à l’impact : comment les départements L&D peuvent-ils dépasser le « so what » ?

Jean-Roch Houllier : Quel département L&D n’a pas déjà été challengé par le business et les opérationnels en matière d’impact de ses formations ? La question du « so what ? » de salariés de retour sur le terrain, parce qu’ils ont rapidement oublié l’essentiel des enseignements dispensés, n’est sans doute pas étrangère à l’image qu’en ont parfois les managers : la formation perçue comme « coût » plutôt que comme un « investissement » utile et durable.

Processus d’évaluation et amélioration continue sont pourtant bien de la partie (d’autant plus avec Qualiopi), mais le plus souvent cantonnés aux évaluations à « chaud » et à « froid », une traduction « quali » inspirée du modèle Kirkpatrick. Les niveaux les plus élevés de ce modèle ont beau porter sur « la mesure de la mise en œuvre des comportements en situation de travail » et sur « l’impact de la formation sur la performance de l’entreprise », cette mesure reste malaisée, notamment parce que les finalités s’expriment le plus souvent sous la forme d’objectifs de formation (taxonomie Bloom). Le lien avec les objectifs stratégiques ou opérationnels (la performance, au sens large, attendue des collaborateurs et des métiers) est beaucoup plus rare. Admettons toutefois la relation « cause (formation) — effet (performance) » est rendue complexe par des facteurs hors formation qui interviennent dans la performance.

Pour démontrer son impact, la formation doit se « connecter » continument au travail et aux compétences (dont la nécessité est mise en évidence par l’analyse préalable du travail), autrement dit : contextualiser les apprentissages, voire intégrer des composantes en situation de travail (AFEST). D’un point de vue pédagogique, le pilotage « bout-en-bout » d’un socle de compétences permet de mesurer concrètement la progression de l’apprenant jusqu’à son autonomie totale ; d’un point de vue opérationnel, les indicateurs « RH » usités (par exemple, le nombre d’heures de formation) sont complétés par des « indicateurs d’opérationnalité » (entre autres, le « Time To Autonomy », i.e le temps nécessaire pour rendre l’apprenant opérationnel sur la ligne de production). Un langage qui, de toute évidence, parle davantage aux opérationnels et ouvre la voie de la réconciliation entre formation et performance !

S’intéresser à l’impact : la formation réconciliée avec les compétences et le business ?

Xavier Voilquin : Historiquement, le cœur du métier L&D a été le contenu. « Content is king » ai-je encore entendu l’année passée de la bouche d’un business leader expérimenté de Medtronic. Mais, avec l’accélération du recours à la Data, avec d’un côté l’IA qui ouvre d’ores et déjà des perspectives prometteuses au développement et à la délivrance de contenus, et de l’autre les systèmes toujours plus interconnectés (à l’image de SIRH connectés à Salesforce lui-même connecté aux LMS et autres LXP), les mesures d’impact seront de plus en plus faciles à produire. Or, ces mesures peuvent également servir à attester de certaines compétences du salarié. Avant les mesures d’impact, on se fiait aux objectifs d’apprentissage à priori ; à posteriori, on mesurait la qualité de la formation dont on déduisait (un exercice hautement aléatoire) l’acquisition de la compétence recherchée. Mais la compétence n’est pas juste la connaissance, elle consiste aussi en la mobilisation de celle-ci. Avec la mesure d’impact, l’acquisition de la compétence (connaissance et mobilisation) ne s’espère plus, elle se démontre. Parce qu’elle existe, elle réconcilie l’apprenant avec la formation. La formation n’est plus une case à cocher, l’interstice d’un simple « moment sympa », mais un réel accélérateur de carrière (voire, pourquoi pas ? de bonheur) dans l’entreprise, la satisfaction personnelle de développer ses compétences et de les utiliser.

La tendance aux mesures d’impact… quel impact sur les Directions learning & development ?

Jean-Roch Houllier : Ce changement de perspective (de la simple mesure de la qualité, autocentrée formation, à celle d’un impact de la formation concret et constaté, au plus près du travail) requiert une reconfiguration des départements de formation. D’abord, le but visé est celui d’une meilleure contextualisation x personnalisation des apprentissages, ce qui suppose de considérer les « persona ». Depuis l’avènement de l’ère digitale et plus encore après le « Big Bang » de l’IA générative, les départements formations sont incités à développer continument leurs compétences dans tous les domaines du digital (réalité virtuelle, IA générative incluses). Les agents conversationnels sont particulièrement prometteurs dans la simulation réaliste de situations « terrain ». L’acquisition de compétences associées aux apprentissages en situation de travail contribue à étendre le périmètre d’intervention des départements formation : entrée sur les « territoires du 70 » (modèle 70/20/20 : 70 % de ce que nous apprenons, nous l’apprenons en situation de travail, 20 % avec les autres et 10 % en formation structurée), développement de leur expertise business et des opérations. Un ou deux membres du département peuvent se certifier en AFEST et rejoindre clubs et associations spécialisés. Un autre changement est associé à la montée en puissance « d’architectes de parcours de formation multimodaux » capables de concevoir tous types de séquences pédagogiques, AFEST incluses. La capacité d’analyse du besoin client et la connexion de la formation au business (compréhension fine des objectifs stratégiques et opérationnels) est un « must » pour un positionnement reconnu de « Business Partner ». Enfin, et c’est sans doute le changement le plus important, les départements formation sont appelés à revisiter leurs indicateurs de pilotage en y ajoutant des indicateurs plus proches du terrain, davantage tournés vers « la fin », le résultat opérationnel escompté, et pas seulement le « moyen » (dans une perspective RH).

Xavier Voilquin : Le rééquilibrage en faveur des mesures d’impact ne risque-t-il pas d’entraîner une rupture culturelle parmi les équipes formations existantes ? C’est une question que je me suis souvent posée… Depuis une quinzaine d’années, entre l’arrivée des LMS, la digitalisation de la production de contenus, la généralisation à pas forcé des formations en classes virtuelles puis l’irruption de l’IA générative, les équipes formation sont soumises à l’accélération du changement induit par la Data. Ce constat implique un upskilling régulier, doublé d’un accompagnement culturel, ou mieux une anticipation. La massification de la Data entraîne certes un glissement certain de l’évaluation sur le terrain des mesures d’impact… En retour, cela fixe une obligation de la « Data literacy » aux équipes formation ; par ailleurs, aura-t-on encore besoin d’ingénieurs pédagogiques, ou devront-ils plutôt se concentrer sur l’acquisition de compétences autour des outils IA, de l’analyse de la Data ? Le département formation sera-t-il à même d’entretenir une collaboration fluide avec les acteurs IT internes ou externes, de quelles compétences auront-ils alors besoin ? À moins qu’il soit plus judicieux de recomposer l’équipe formation autour de processus de « production assistée par Data » pour concourir à des mesures d’impact toujours plus fines ?

Propos  recueillis par Michel Diaz

ARTICLES RÉCENTS DANS LA MÊME THÉMATIQUE Évaluation & engagement
L'ascension fulgurante d'un nouveau champion de la certification •SUITE Évaluer pour révéler : du bon usage de l'évaluation à la Caisse des Dépôts •SUITE
Formation continue : le calcul du ROI bientôt à portée ? •SUITE Comment assurer la maîtrise totale des connaissances ? •SUITE
Comment s'assurer de la valeur des modules de formation en ligne ? •SUITE Les compétences valent de l'or ? Mettez-les en sécurité dans votre coffre-fort ! •SUITE
La performance des métiers : raison d’être de la formation ? •SUITE Évaluation et IA : vers une culture d’entreprise fondée sur la connaissance maîtrisée •SUITE
Certification et LMS : le piège des attestations sans valeur •SUITE Vos formations sont-elles aussi performantes que vous le croyez ? •SUITE
page précédente retour à l'accueil tous les articles
À LIRE CETTE SEMAINE
Un novembre 100% impact pour les professionnels de la... •SUITE
Au début était l'action (Goethe) •SUITE
Atlas : le navigateur qui avale la formation ! •SUITE
Dans l'industrie et les bureaux, la robotisation impose le... •SUITE
Contenus de formation : le doute est-il encore possible ? •SUITE
L'ascension fulgurante d'un nouveau champion de la... •SUITE
OFFRES D'EMPLOI
Graphiste (H/F) – Stage – 6 mois
SmartCanal
Ingénieur pédagogique (H/F) – Stage – 6 mois
SmartCanal
ILS INFORMENT
DISTRISOFT : Rationnalisez vos budgets de traduction avec Articulate Localization
Experquiz : Créer un QCM en ligne n’a jamais été aussi simple !
PROCHAINS ÉVÉNEMENTS
Intégrer l’IA à ses pratiques pédagogiques
du 18 NOVEMBRE 2025 au 02 DÉCEMBRE 2025 / ISTF
Articulate Storyline: Formation (inter présentiel)
du 18 NOVEMBRE 2025 au 20 NOVEMBRE 2025 / DISTRISOFT
LES PLUS LUS
Comment assurer la maîtrise totale des connaissances ?
Neurosciences et engagement : capter l’attention dans...
Former, c'est engager !
Former à Moodle autrement : quand la pédagogie guide la...
Dernières annonces de ChatGPT : bouleversement attendu dans...
IA clandestine et inertie numérique : un cocktail à haut...
reviVRe : la réalité virtuelle au service de la formation...
L’équipe apprenante pour de vrai ? C'est possible (et...
INSCRIPTION NEWSLETTER CONTACTEZ NOUS PUBLIEZ OFFRE D'EMPLOI PUBLIEZ ACTUALITÉ MENTIONS LÉGALES CENTRE DE PRÉFÉRENCES
www.e-learning-letter.com - © copyright e-learning Media 2025 - images fournies par Adobe Stock et Freepik - tous droits réservés - déclaration CNIL n°1717089 - email : informations@e-learning-letter.com - création : Fair Media ®