En repensant la formation de ses 1 200 collaborateurs de la filière finance, Bouygues Construction a relevé trois défis majeurs : standardiser les pratiques à l’international, rendre les contenus plus attractifs et intégrer l’économie circulaire. Finaliste des Trophées du Digital Learning 2024, son projet BYNAPS, fondé sur l'e-learning et la collaboration avec des start-ups spécialisées dans l'IA, a permis de développer une solution innovante et multilingue pour une montée en compétence accélérée.
À quels enjeux de formation répondait le projet de Bouygues Construction, Finaliste des Trophées du Digital Learning 2024 ?
Olivier Dubost : Notre projet ne couvrait pas l’ensemble de la Formation Bouygues Construction, mais la Filière Finance, soit 1 200 personnes réparties sur nos implantations dans environ 60 pays. Nous avions un triple enjeu : partager au quotidien un socle commun de valeurs (nos procédures), de culture (notre vocabulaire), de savoir faire (notre technique Métier) ainsi que de bonnes pratiques ; créer de nombreuses formations rapidement, multilingues et économiques ; intégrer l’économie circulaire dans notre conception en recyclant du contenu existant : vidéos, interviews, présentations…
L'e-learning est une réponse évidente…
Olivier Dubost : Oui, mais il consomme beaucoup de ressources financières (en externe), humaines (en interne) et du temps dans tous les cas. Idéalement, nous souhaitions pouvoir produire ou recycler rapidement du contenu existant et le transformer en petits modules de formation dans plusieurs langues. C’est dans cette optique, doublée d’une rencontre avec deux start-ups innovantes (Neurowide pour la traduction automatique, Nolej pour la conception pédagogique) que le projet BYNAPS est né.
Il s’agissait aussi de susciter un intérêt durable pour l’apprentissage ?
Olivier Dubost : Une enquête menée auprès de nos collaborateurs nous a conduits à revoir notre stratégie de formation. En effet, malgré la disponibilité croissante de plateformes e-learning gorgées de contenus de formation, beaucoup de collaborateurs peinent encore à s'engager pleinement dans ces parcours de formation, parce que l’offre de formation manque d’attractivité et que le marketing de la formation ne suffit pas à susciter l’intérêt et l’engagement. Il était crucial de dynamiser l'offre e-learning et de revoir les stratégies de communication pour que nos collaborateurs s’approprient véritablement leur montée en compétences. Il ne faut pas sous-estimer le potentiel du marketing dans l’engagement des collaborateurs : une campagne de communication interne peut transformer l’image, parfois perçue comme rigide ou chronophage, des formations en ligne en une opportunité de développement personnel et professionnel. Par ailleurs, pour renforcer l’engagement des collaborateurs, ils doivent être placés au cœur de leur apprentissage : plutôt que d’imposer des parcours standards, leur offrir la possibilité de personnaliser leurs formations selon leurs besoins, aspirations et emploi du temps. Des outils comme les évaluations amont pour les aider à identifier et à personnaliser les formations vont dans ce sens. Il ne s’agit pas seulement de moderniser les contenus de formation, mais d’insuffler également une culture de l’apprentissage en continu au sein de l’entreprise.
D’où une véritable roadmap…
Olivier Dubost : Notre feuille de route répond aux défis que je viens d’évoquer : visibiliser l’offre, digitaliser et dynamiser le catalogue de formation pour améliorer son accessibilité ; mettre le collaborateur au cœur de sa montée en compétence ; personnaliser les offres pour déboucher sur des parcours adaptés et accompagner le collaborateur dans la construction de son parcours de formation personnalisé en fonction de son positionnement professionnel, son profil, ses orientations… L’enrichissement de l’offre de formation s’appuie dorénavant très fortement sur BYNAPS, devenu l’outil interne au cœur de la création de contenus.
Point fort : l’innovation. Quels en sont les éléments essentiels ?
Olivier Dubost : D’abord, l’addition du savoir-faire des deux start-ups utilisant l’IA générative que j'ai mentionnées dans le champ de la transcription et la traduction automatique et la génération d’activités pédagogiques. La traduction étant un métier, créer des modèles pertinents, précis et efficaces est extrêmement complexe. Ensuite, l’innovation a consisté en la création d’un processus très simple d’utilisation : sans aucune modification, vous pouvez créer un module de formation en quelques minutes. Faire simple ! Notre projet a été un moment surnommé le « Thermomix™ de la formation » : hautement technologique, simple d’utilisation, des recettes impossibles à rater !
L’accent est mis sur les soft skills ?
Olivier Dubost : Pas seulement, vous l'aurez compris, car notre projet embrasse plus largement la question de l’acculturation à la gestion financière chez BYCN (procédures, vocabulaire, socle commun de connaissance…). Ces thématiques ne sont jamais abordées directement : nos collaborateurs les acquièrent avec le temps et souvent sur le tas, alors qu'elles constituent une part de notre ADN. D'une façon générale, on peut dire que BYNAPS est un accélérateur d’apprentissage de notre culture financière et d’intégration rapide de nos nouveaux talents.
Vous avez également déployé des formations spécifiques à l'international…
Olivier Dubost : Plus de 60 % de notre CA étant réalisé à l’international, l’internationalisation de nos formations est un enjeu majeur pour l’ensemble de l’entreprise. La Filière Finance s’est fortement engagée : tout nouveau module doit systématiquement être réalisé en français et en anglais, et diffusé simultanément dans les deux langues, ce qui entraîne des contraintes de planning importantes (double production, traduction, relecture…) doublées de contraintes financières. BYNAPS répond parfaitement au double défi de produire en plusieurs langues et à coût réduit sans altérer la qualité.
Quels enseignements clés tirez-vous de la mise en œuvre de ce projet ?
Olivier Dubost : Le premier enseignement, c’est que nous devons avoir une approche globale, systémique. S’il n’est pas visible, le plus beau module du monde ne sera pas suivi ! Il nous faut avancer en parallèle sur le contenu, le marketing de l’offre, le positionnement du module et la communication. Et, saisir toutes les opportunités pour le promouvoir : réseaux sociaux internes, évènements internes (finance forum, concours innovation, webinaire…) ou externes (trophées, interviews, réseaux…). Le second enseignement : satisfaire mon « client ». Certes, j’ai pris beaucoup de plaisir à développer BYNAPS, j’ai fait de belles rencontres. Mais, à quoi bon, si je ne réponds pas aux attentes des financiers de BYCN ? Répondre à ces attentes, c’est ma seule boussole ! Les modes de consommation de l’apprentissage ont changé. Un module e-learning de plus de 15-20 minutes n’est plus suivi. Faisons en sorte de considérer cette nouvelle donne dès la conception. Une image pour illustrer cette disposition : la Galaxie « Procédures » et ses satellites dans laquelle je retrouverai chaque procédure financière de l’entreprise dans un module de 3-4 min vs les classeurs utilisés avant !
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