IA, ces 2 lettres : coups de tonnerre dans l’écosystème du Learning. Source d’enthousiasme pour certains ; d’inquiétude, voire pire, pour d’autres. Une posture ancrée dans 5 mythes de l’IA passés en revue.
« Ils ne mouraient pas tous, mais tous étaient frappés » (Jean de La Fontaine, Les animaux malades de la peste)…
Ce constat, Jean de La Fontaine n’aurait pas manqué de faire devant les innombrables débats, articles, tables rondes ou autres conférences sur la thématique de l’Intelligence artificielle générative appliquée au monde de la formation. Prolongeant sa réflexion, il observerait peut-être qu’une nouvelle peste se répand rapidement, tant cette technologie est devenue contagieuse (réchappant de la Covid-19, on plongerait ainsi dans une nouvelle épidémie). Chacun se faisant son opinion (éclairée, voire inspirante, dogmatique et déroutante), nous avons jugé utile de relever quelques termes d’un Débat qui ne laisse personne indifférent.
5 Mythes de l’Intelligence Artificielle appliquée à la formation
Les multiples et foisonnants débats (que l’IA suscite parmi les professionnels de formation) se rapportent à quelques énoncés, qui relèvent largement de la Doxa (l’opinion qu’on se fait de ce phénomène). Au sens étymologique, ces opinions sont des mythes : “des énoncés qui apparaissent comme vrais”, ou, plus modestement, des mythologies (pour reprendre Roland Barthes). J'en compte cinq (il ne tient qu’au lecteur d’en compléter la liste !) :
#1 L’IA va me remplacer : L’histoire des technologies en apporte de multiples preuves : une innovation de rupture est toujours doublement pressentie comme destructrice et créatrice d’emploi. Le moteur thermique a donné naissance à l’industrie automobile en détruisant toutes les activités (création, maintenance, services) attachées aux précédents modes de déplacement. L’IA générative ne manque pas de soulever ces questions : quels seront les emplois détruits ? quels seront les emplois créés ? est-ce que les seconds compenseront, en volume et en qualité, les premiers ? est-ce que les professionnels de formation évincés par l’IA générative pourront être formés aux nouveaux emplois créés par cette même innovation ?
#2 L’IA est faite pour tous : L’IA c’est facile ! De nombreux outils « no-code » voient régulièrement le jour, qui permettent à quiconque de « prompter » facilement… au moins en apparence ! Et, l'on voit fleurir une multitude de formations sur « l’art du prompt », souvent de courte durée, pour nous faire entrer de plain-pied dans le nouveau monde de l’IA générative. Mais à y regarder de plus près, les outils (je pense à Midjourney) sont loin d’être aussi « abordables » qu’il y paraît. L’IA (ChatGPT et ses concurrents) vraiment accessible à tout-un-chacun ? Il ne doit pas être interdit d’en douter.
#3 Dans le champ des IA, on doit tester : En matière d’IA, il semble y en avoir pour tous les goûts : création d’images, génération de présentations Powerpoint, sous-titrage de vidéo ou traduction automatique, etc. Il appartient aux responsables formation de se faire leur propre opinion sur les possibilités offertes parmi les 6 000 outils utilisant l’IA générative, auxquels on pourrait ajouter les nombreux plugins ChatGPT d’ores et déjà disponibles… Cette pléthore débouche sur une question : l’approche « Test & Learn » si vantée en formation, est-elle applicable dans le vaste domaine de l’IA ?
#4 Les résultats des IA sont forcément vraisfaux : Dans l’utilisation que nous avons des IA génératives (par exemple, pour créer des trames de présentation ou d’argumentations), notre expérience nous dicte que résultats obtenus remontés sont suffisamment corrects pour être presque directement utilisables, avec un précieux gain de temps à la clé. Or, 30 % des résultats générés par ChatGPT sont faux ou incorrects ! C’est que l’IA n’est pas une pure abstraction : ses résultats sont produits à partir de sa base des données qu’elle considère comme le plus proche de la requête de l’utilisateur. Prudence de rigueur !
#5 L’IA, c’est une école de la paresse : Dans une récente étude (PwC), l’utilisation de l’IA générative, par un échantillon de consultants, permet d’assurer un gain de productivité de 40 %. Certes, l’IA est un accélérateur de tâches, comme la calculatrice a autrefois permis de gagner du temps en arithmétique. Mais, si l’on parvient à opérer plus rapidement, sait-on seulement dans quel ordre de grandeur ? Se reposer sur les résultats générés par l’IA, c’est oublier son esprit critique au risque de tout prendre pour argent comptant. Encenser l’IA, nouvel éloge de la paresse ?
Cette recension de 5 mythes de l’AI l’atteste : chaque mythe est à double-face (un vrai Janus que cette IA !), vrai ou faux selon l’angle de vue, ou, par exemple, l’échelle et l’intervalle de temps retenu. De fait, ce n’est pas une logique binaire qui peut en décider : « l’IA va me remplacer ? » : Oui et non ! « L’IA est faite pour tous ? » : Oui… et non. Etc.
Take away
La fonction de ces mythes est de nous guider, comme responsables formation, dans l’approche de l’IA appliquée à notre domaine, car il faut s’en convaincre, l’IA entre en force dans les métiers de la formation. Cette interrogation — que nous donnent-ils à comprendre ? que disent-ils sur le « mindset » des professionnels de formation ? — n’est pas le moindre de leur mérite.
À suivre.
|