Retour sur un projet Finaliste des Trophées du Digital Learning 2023 : le Groupe Thales se transforme en une organisation apprenante. La Direction de l’Engineering lance un changement profond pour gagner en compétitivité : ses « Head of Discipline » devenant les ambassadeurs de cette transformation. Ils ont été formés à travers un cycle innovant d'apprentissage fondé sur des « sprints », impulsant une réinvention de la formation centrée sur l'apprenant, avec un rôle renouvelé pour les responsables de formation comme facilitateurs.
Devenir une organisation apprenante est au cœur du nouveau plan stratégique du Groupe Thales ?
Isabelle Rousseau : Ingénieurs chez Thales, nous avons pour mission de produire des solutions technologiques innovantes, qui répondent aux besoins de nos clients, tout en assurant notre compétitivité. Nous visons l’excellence au quotidien pour honorer nos engagements de qualité, délais et coûts. Nous avons le devoir de mettre à profit les nouvelles technologies, particulièrement les innovations numériques, pour nous adapter aux évolutions de nos marchés et préserver notre leadership. En parallèle, nous évoluons dans un monde fait d’incertitude, en constante mutation, imprévisible, où le rythme des évolutions sociétales, des progrès de la technologie ou des événements géopolitiques s’est accéléré. Dans ce contexte, notre priorité est d'investir dans les compétences et le savoir-faire de nos ingénieurs et techniciens en nous positionnant en tant qu’organisation apprenante, ce qui nous parait être le moyen le plus performant de maintenir nos compétences à jour, de nous développer, de nous adapter rapidement pour délivrer avec la performance attendue. Devenir une organisation apprenante est d’ores et déjà identifié comme l’une des ambitions et objectifs majeurs du nouveau plan stratégique du Groupe.
Quel est le rôle des « HoD » dans cette transformation ?
Isabelle Rousseau : La Direction de l’Engineering a lancé une importante transformation visant à repenser notre organisation et nos modes de fonctionnement pour gagner en compétitivité et renforcer l’amélioration continue. Dans cette transformation, les Head of Discipline (HoD) jouent un rôle clé : assurer la vision durable de leur discipline et développer les équipes attachées à cette discipline pour assurer la performance des projets. N’étant plus responsables de la partie delivery à proprement parler, leur changement de posture conditionne la réussite de la transformation engagée : la dimension « change » des HoD est devenue prépondérante, ainsi qu’une forte exigence de Servant Leadership (leader facilitateur pour ces équipes). Pour résumer : ils deviennent ambassadeurs de la transformation ! Ce qui leur impose d’incarner une culture de l’apprentissage en continu dans les équipes opérationnelles et d’impulser la création d’une communauté de pratiques.
Quels sont les principes qui ont présidé à la formation des HoD ? Comment ces principes se sont-ils pratiquement traduits dans la solution de formation retenue ?
Isabelle Rousseau : Pour favoriser ce changement de posture des HoD, nous les avons formés à ce qu’on pourrait qualifier de « cycle de la formation » : définition du besoin de formation dans une équipe opérationnelle, élaboration d’une stratégie de formation, mise en pratique, bilan et partage pour clôturer ce cycle d’apprentissage. Les apprenants décident des sujets sur lesquels ils ont besoin de se développer ensemble, notamment en échangeant avec leurs pairs, ils apprennent conjointement, les uns des autres. Dans ce parcours suivi par les HoD, des rituels de co-apprentissage sur un rythme régulier sont créés, sur des sujets relatifs à leur activité et aux grands axes de la transformation de l’ingénierie. Le contenu est donc co-construit avec les apprenants ; il évolue au fur et à mesure de leurs besoins.
Thales est convaincu que ces communautés d’apprentissage, concentrées sur les vrais défis du quotidien, seront la clé de l’engagement et de la création de richesse dans les divers groupes concernés. Notre programme de formation embarque les HoD dans une communauté de pratiques qui prendra le relai à la fin de la formation, avec des apports d’experts et des ateliers en libre accès, des échanges entre pairs tout au long de la formation. Notre objectif : changer leur façon d’apprendre, développer des méthodes de travail collaboratives pour assurer l’amélioration continue nécessaire à notre compétitivité dans un monde VUCA.
Le modèle du « sprint » est au centre du parcours de formation…
Isabelle Rousseau : Nous avons mis en place quatre sprints qui correspondent aux quatre piliers de la transformation de l’engineering. Un « sprint », c’est un cycle d’apprentissages sur le sujet choisi par le groupe, qui débute par une session d’induction, puis des moments d’apprentissages en sous-groupes, suivis par un moment de partage et de rétrospective.
Pendant ces sprints, l’apprentissage se fait à plusieurs niveaux : en individuel : assessment Hogan avec mise en place d’un dispositif de micro actions, e-learning… ; en sous-groupe : un « learning moment » de 2 heures par semaine durant 7 semaines (utilisation de Klaxoon) ; en cohorte : Kick off des sprints, rétro démo, différents apports de contenu par des « global learning moment » sous forme de témoignage, de workshop, d’interview, d’apport de contenu théorique, d’exercice d’application…
Quel bilan tirez-vous de ce programme de formation ?
Isabelle Rousseau : Un des principaux défis, c’est le temps requis (2 heures par semaine) par ce programme très exigeant qui aborde de nombreux sujets. Pour favoriser un engagement durable, nous avons revu nos objectifs pédagogiques et adapté le parcours pour la cohorte 2023-2024. Il est essentiel de laisser du temps aux participants pour mettre en pratique les enseignements en équipe et assimiler les connaissances acquises. Le deuxième défi, c’est d’extraire les connaissances tacites des participants à un groupe, chaque participant étant effectivement une source de savoir à partager ! Ces connaissances, difficilement accessibles, revêtent pourtant une grande importance pour la réussite des projets.
Je suis convaincue que ce type de programme est appelé à se généraliser, car il réinvente l’expérience d’apprentissage : le pouvoir est ici donné aux apprenants, celui d’apprendre à leur rythme, sur une plus longue échelle de temps, en se concentrant sur leurs besoins réels, tout en restant connectés à leur communauté d’apprentissage et en préservant un aspect individuel fort. Ce changement transforme aussi le rôle du Responsable Formation, en nous plaçant davantage dans un rôle d’animateur, de facilitateur des savoirs. J’aime à penser que nous devenons des coachs de l’apprentissage !
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