Le programme FEEBAT, en quelques mots ?

Chloë Langlais : Le programme FEEBAT accompagne depuis 2007 la montée en compétence des professionnels du bâtiment dans le domaine de l’efficacité énergétique. Initié en 2018, l’axe Formation initiale du programme FEEBAT vise à préparer « les futures forces vives de la rénovation énergétique » : les élèves et apprentis du CAP au BTS, et les étudiants des Ecoles Nationales Supérieures d’Architecture et du Paysage (ENSAP). Former ce public, rendre ces métiers attractifs : ces défis sont essentiels pour réduire les consommations énergétiques des bâtiments et atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050.

Beaucoup de bonnes fées se sont penchées sur le berceau !

Chloë Langlais : En effet… Depuis 2022, l’Association Technique Energie Environnement (ATEE) est le porteur pilote du programme FEEBAT dont elle assure également le portage de la formation continue des professionnels en activité.

La Formation initiale est, quant à elle, pilotée par l’Agence Qualité Construction (AQC). Les travaux sont conduits dans une relation étroite avec le ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse, le CCCA-BTP et le ministère de la Culture.

Dans la gouvernance du programme, on trouve également d’autres acteurs : le ministère de la Transition énergétique, le ministère chargé du Logement et le ministère du Travail du Plein emploi et de l'Insertion, l’Ademe, des organisations professionnelles (CAPEB, FFB, SCOP-BTP), l’ordre des architectes (CNOA), et également des financeurs (EDF, SIPLEC, Distridyn). Le financement du programme s’inscrit dans le dispositif des Certificats d’Economies d’Energie (CEE).

Quelle est la cible de l’axe Formation initiale du programme FEEBAT ?

Chloë Langlais : Cet axe de travail est décliné en deux projets. Le projet Education nationale/ CCCA-BTP cible les 100 000 élèves et apprentis formés chaque année, engagés dans l’un des 100 titres et diplômes liés au secteur du bâtiment, du CAP au BTS, en métropole et Outre-Mer. Pour cela, nous formons près de 10 000 enseignants de l’Education nationale et formateurs du réseau de l’apprentissage. En tout, 5 filières de métiers sont visées, dont des secteurs reconnus en forte demande : Systèmes énergétiques électriques, Systèmes énergétiques non électriques, Gros œuvre et enveloppe du bâtiment, Prescription et économie, Second œuvre et aménagement intérieur.

En parallèle est mené le projet « Métamorphoses ». Ce dispositif de formation s’adresse aux étudiants des 20 ENSAP et à leurs enseignants.

Pourquoi avoir opté pour une approche blended learning ?

Chloë Langlais : L’approche en blended learning était une évidence pour aborder ce projet complexe. Et il fallait pousser les limites du blended learning pour aboutir à des parcours hybrides et modulables. C’est indispensable quand il s’agit d’enjeux collectifs majeurs, comme la rénovation énergétique, qui exigent une solide montée en compétences générales tout en respectant des situations individuelles hétérogènes. Dans le projet Education nationale/CCCA-BTP, il fallait concilier de nombreux enjeux et pas des moindres : apporter des solutions souples pour s’adapter aux différents niveaux visés et à chaque situation individuelle, pour soutenir le principe de liberté pédagogique de l’enseignant, et pour faciliter l’appropriation du dispositif. Le format des capsules produites devait aussi être facilement déployable dans des environnements techniques variés, selon les équipements de chaque établissement scolaire, voire de chaque apprenant.

L’hybridation des contenus a permis de concevoir 30 parcours cumulant plus de 1000 séquences pédagogiques à assembler librement pour faire face à toute situation : des séquences à déployer en salle avec le groupe d’élèves ou à suivre en autonomie en format présentiel ou en digital, synchrone et asynchrone. L’accent a été mis sur des solutions innovantes favorisant l’interactivité, l’attrait, et donc l’attention des apprenants : réalité augmentée, serious game, jeux interactifs, immersion 360°...

Quels freins avez-vous rencontrés ?

Chloë Langlais : Il s’agit moins de freins que des défis liés à la grande complexité et à l’ampleur inédite du projet, auxquelles s’ajoutent de fortes attentes collectives en matière de transition écologique et énergétique. Pour le projet Education nationale/CCCA-BTP, outre la compréhension de l’hétérogénéité du public ciblé, il a fallu une appropriation des matrices de compétences liées à une centaine de titres et diplômes. D’où la mobilisation d’équipes d’experts complémentaires, sachant s’adresser à des niveaux de certification variés, ainsi qu’à un public lui-même déjà doublement sachant en matière pédagogique et technique (le public des enseignants et formateurs). 

Sans oublier qu’il fallait englober aussi bien les enjeux énergétiques métropolitains qu’ultramarins. Nos appuis : une équipe de conception innovante en matière pédagogique et technique, Very Up et Pouget Consultants. Et l’implication soutenue des équipes de l’Education nationale et du réseau de l’apprentissage (enseignants, inspecteurs, services de formation continue…). Enfin, pour fluidifier l’appropriation d’un tel dispositif, il était impératif d’embarquer dans une même dynamique toutes les parties prenantes : les élèves et apprentis, l’équipe enseignante, les formateurs de formateurs ainsi que les équipes administratives locales ; les parties prenantes sont toutes à un moment des « apprenants » et des « facilitateurs ».

Quel bilan qualitatif et quantitatif en tirez-vous ? Quels sont les facteurs de succès d’un tel projet ?

Chloë Langlais : Les deux premiers modules « Enjeux de la rénovation énergétique » et « Principes de la performance énergétique » conçus pour l’Education nationale et le CCCA-BTP sont en cours de déploiement. Ils rencontrent l’adhésion des enseignants et élèves qui apprécient la variété, la qualité et le ton des ressources proposées, ainsi que la possibilité de monter en compétences à leur rythme. À noter ; ces deux modules ont été lauréats du Trophée Digital Learning 2023 – Catégorie Blended & Accompagnement ! Les facteurs de succès d’un tel projet hybride innovant vont au-delà de l’expertise technique ou pédagogique poussée. Elargir l’écosystème des parties prenantes et susciter l’adhésion est central pour répondre aux besoins visés . En plus de la conception des ressources, nous avons produit de solides dispositifs d’accompagnement et d’information. Ce sont des leviers d’engagement essentiels.