Pour Amélie Barloy Lancrenon (Content & Partnership Director, Coorpacademy by Go1), tout indique que les formations visant au bien-être des collaborateurs sont appelées au plus grand avenir ; de fait, leur présent est d’ores et déjà brillant. Ses explications sont convaincantes.
Avez-vous observé une demande croissante pour les formations visant au bien-être dans l’entreprise ?
Amélie Barloy Lancrenon : Oui, nous l’avons constaté pour toutes les entreprises, quelle que soit leur taille ou leur secteur d’activité. Les directions L&D témoignent d’un intérêt de plus en plus fort pour les questions de bien-être et d’inclusion de tous les employés. Cela se manifeste notamment dans les animations mises en place pour encourager à la formation, qui se consacrent davantage à la santé, par exemple à l’occasion de la Journée Mondiale de la Santé Mentale ou de la Semaine européenne pour l'emploi des personnes handicapées. De ce fait, 20 % du top 50 des cours les plus consultés dans le catalogue Coorpacademy sont désormais consacrés à la thématique du bien-être en entreprise. Ce ratio était de moins de 12 % il y a un an et demi.
Quels sont les cours qui ont été le plus demandés ?
Amélie Barloy Lancrenon : Le bien-être des employés peut être abordé sous de multiples angles. Aujourd’hui, ce sont les formations mettant l’accent sur l’aspect psychologique du bien-être qui sont les plus demandées : développer son intelligence émotionnelle, rester zen au travail, entamer une conversation sur la santé mentale avec un employé, ou encore développer sa résilience. En tant qu’individu, mais également comme manager. Nous avons aussi vu une hausse des demandes sur le travail hybride. Cette organisation est en passe de devenir la nouvelle norme pour de nombreux métiers et pose de vrais défis de santé physique et mentale. Cela contribue à la hausse récente des demandes sur le bien-être en entreprise.
Comment expliquez-vous la montée en puissance de ces formations ?
Amélie Barloy Lancrenon : La formation continue est une affaire de temps long. Si nous avons su anticiper les demandes sur le bien-être en sortie de confinement, c’est aujourd’hui qu’il faut investir dans la formation, alors qu'apparaissent les risques psychosociaux causés par l’isolement, la perte de repères, l’incertitude, la remise en question des modèles de travail traditionnels, l’apparition du travail hybride, etc. En France, 34 % des télétravailleurs disent se sentir toujours ou souvent seuls, contre 19 % des Français en moyenne (source : le baromètre Ifop « Les Français et la solitude », 2022). Face à la généralisation du télétravail, Coorpacademy a publié dix nouvelles formations sur ce thème en 2022 : des bonnes pratiques du travail hybride (conçu avec Learn Assembly) à adapter son management à distance (avec Video Arts) ou bien à s’exercer à rester actif à son bureau (avec Yogist). Pour finir, l’augmentation des demandes de formation sur le bien-être révèle surtout que les entreprises se saisissent de ce sujet et considèrent la formation comme une brique essentielle de l’accompagnement de leurs employés.
Prévenir le burn-out, se préoccuper du bien-être et de la santé mentale des collaborateurs… effet de mode ou tendance lourde ?
Amélie Barloy Lancrenon : Le bien-être des employés est un indicateur de la santé de l'entreprise, de sa capacité à innover, à se repenser comme à recruter. Quand on sait que 2,5 millions de travailleurs sont en burn-out sévère en France, on se dit qu’il y a urgence à former sur ce sujet, pour le bien de l’employé et de son entreprise. Si le catalogue Coorpacademy permet de se former sur des compétences transverses telles que la gestion du stress, le leadership inclusif, ou dans un autre registre, la culture digitale ou la pensée durable, c’est parce qu’en investissant dans le développement de ses employés, les objectifs des employés et de l’entreprise convergeront.
On peut aussi considérer qu’il y va de la fidélisation et de la mobilité interne des talents…
Amélie Barloy Lancrenon : Une entreprise qui investit dans des formations misant sur l’épanouissement des employés envoie un signal de bonne santé. Cela rassure et donne de la confiance à l’employé. Aujourd'hui, les modèles managériaux, organisationnels et économiques sont questionnés et le candidat est en quête de sens dans son travail. Dans ce contexte, une entreprise inclusive et investie dans la formation sur la santé de ses employés sera aussi plus attractive en prouvant qu’elle tient compte des enjeux moraux et sociétaux auxquels aspire une grande part des candidats. À commencer par le recrutement. Nous avons d’ailleurs développé un cours pratique (avec Sia Partners) sur le recrutement inclusif. Nous y abordons comment rédiger une offre d'emploi inclusive, comment sélectionner un CV et faire passer un entretien de manière inclusive. Enfin, une entreprise sera plus à même d’ouvrir ses viviers de recrutement aux profils diversifiés si elle a elle-même créé les conditions d'accueil favorables ainsi qu’un leadership inclusif. Cela lui permettrait ainsi de faire face à une difficulté de recruter.
Pourrait-on affirmer que la capacité d’une personne à développer son bien-être et à maintenir sa santé mentale est une « soft skill » ?
Amélie Barloy Lancrenon : Dans une certaine mesure, liée à la prévention, savoir s’occuper de son bien-être physique et psychologique est effectivement une soft skill. Cependant, n'oublions pas que la question de la santé mentale est un enjeu vital pour tous et, à plus grande échelle, un enjeu de cohésion et d’inclusion de profils divers. Les troubles de la santé mentale sont encore tabous dans le milieu professionnel. Les ignorer exclut une grande partie de la population du marché du travail. Selon l’OMS, la dépression est la première cause d’incapacité dans le monde, touchant 300 millions de personnes. Avec une meilleure prévention au travers de la formation, l’entreprise détient une clé unique pour répondre au risque d’exclusion et pour avoir un impact social positif. Depuis 2017, nous accompagnons d’ailleurs l’initiative QualityRights de l’OMS à travers une plateforme dédiée à la santé mentale, aux droits humains et au rétablissement. Cette formation promeut des soins de qualité et les droits des personnes en situation de handicap psychosociaux, intellectuels et cognitifs. Grâce à ce programme, nous avons participé à former plus de 74 000 personnes dans le monde.
Quels cours allez-vous lancer en 2023 dans ces domaines ?
Amélie Barloy Lancrenon : Nous souhaitons fortement contribuer à une prise de conscience sur ce thème. Parmi les idées en étude, nous travaillons sur un escape game digital qui permettrait au plus grand nombre d’appréhender à travers le jeu les différentes formes de handicap invisible, comme la sclérose en plaque, l’autisme Asperger, les troubles de déficit de l’attention ou encore la dyslexie. Nous avons aussi d’autres cours prévus autour de la diversité et de l’inclusion notamment, ainsi qu’une série de quatre cours autour de l’expérience employé : comment fidéliser et prendre soin de ses collaborateurs ? À suivre !
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