Une vieille histoire toujours d’actualité 

« Il était une fois un artiste, qui faisait de magnifiques croquis au fusain. Il était reconnu par ses pairs et par ses clients, pour sa créativité et les émotions qui émanaient de ses dessins. On dit que toute personne exposée à l’une de ses œuvres, ne pouvait plus l’oublier ! Un jour, il découvrit la peinture, une discipline qu’il décida de s’approprier pour varier et amplifier son art. Mais, qu’il usât du fusain ou de l’aquarelle, l’impression laissée par ses œuvres demeurait inchangée, toujours mémorable. ».

Cette vieille histoire résonne aux oreilles contemporaines. La digitalisation accélérée des formations, tout particulièrement ces deux dernières années, a pu laisser penser à tort que c’est la palette d’outils qui faisait l’artiste ! M’en inspirant, je veux insister ici sur l’importance de la scénarisation, comme première marche de l’escalier à gravir par le formateur ou le concepteur pédagogique (l’un ou l’autre, dans la peau d’un artiste !) avant de poser le pied sur la prochaine marche de la digitalisation.

Scénariser une formation

Scénariser une formation n’est pas un luxe et doit absolument passer en priorité avant de digitaliser. Le but est bien de créer une « expérience d’apprentissage » tissant, autour de l’activité d’apprendre, un contexte qui engendre de la curiosité, joue avec les émotions, suscite, par exemple, la surprise dans le script d’une « histoire » sachant mobiliser les ressorts du jeu dans la pédagogie. Scénariser, c’est parfois (souvent ?) casser les codes traditionnels de la formation, pour offrir à l’apprenant une expérience inédite. Constat : en tant qu’ingénieure pédagogique, je consacre tellement de temps, dans ma collaboration avec les formateurs, à la formulation des objectifs pédagogiques et à l’élaboration des scripts, que la scénarisation semble s’être finalement évanouie dans le sillage d’une activité « étude de cas » ou d’un « kahoot » toutes les heures et demie !

Objectifs pédagogiques, scénarisation puis choix des outils

Certes, un peu d’ordre est nécessaire. Et l’on peut procéder logiquement : choix des objectifs pédagogiques ; définition du thème, du cadre, de l’intention qui préside à l’exercice pédagogique ; puis, enfin, construction des outils, génériques ou sur mesure, dont le nombre et la nature ne cessent de s’accroître : quiz digitaux ou papier, cartes à jouer, pions, ardoises, QR codes… La liste des possibles n’est limitée que par l’imagination des pédagogues. Pour illustrer, si nous comparons un formateur avec l'artiste dont je vous ai parlé plus haut et que nous l'interrogions sur les tenants de son succès, il répondrait sans doute : « Je ne sais pas » ! Pour ajouter aussitôt : « En fait, je ne cesse d’expérimenter, de tester des nouvelles façons de communiquer mes idées, mes émotions, dans des tentatives qui varient avec chaque œuvre, en espérant que chacun pourra y voir quelque chose qui le touche, qui lui parle. ». C’est à ça que sert la scénarisation. A transmettre et faire passer des messages, à marquer les esprits pour que germent en eux des idées, des envies. Considérez vos formations comme des œuvres à part entière et, de nouveau, ne pensez pas que c’est la palette de couleurs qui fait l’artiste.  

Quel metteur en scène êtes-vous ?

Si vous considérez vos formations comme des œuvres ou même comme des films, quel metteur en scène pensez-vous être ? Quels scénarios mettez-vous en place ? Quel type de film tournez-vous, quelle expérience faites-vous vivre à vos apprenants ? La scénarisation est au fondement d’un film suscitant plaisir et adhésion, offrant rebondissements, surprises et profondeur, loin d’une sitcom prévisible et linéaire. Et vous, quel metteur en scène êtes-vous ?

(Article écrit par Lucie Dhorne, alors qu'elle était Responsable du Pôle Ingénierie Pédagogique d'Eurovia ; adaptation par e-learning Letter)