En pleine transformation, la fonction formation est confrontée à des projets complexes qui lui suggèrent de s'approprier cinq territoires… En matière de conduite de projet, deux approches — le Cycle en V et l’approche agile — semblent s’affronter ; à tort : elles constituent ensemble « la compétence projet élargie », qui s’impose désormais aux professionnels de formation… Un focus pour clôturer ces trois volets sur la conduite de projet…
Cycle V vs Agile ?
En matière de gestion de projet, deux approches semblent irréconciliables :
- Le cycle en V : Le projet vise à produire un « livrable » qui doit être décrit à l’avance, de façon aussi complète et détaillée que possible, dans un délai et moyennant un budget fixé au démarrage du projet. Cette approche est rassurante : il semble qu’on sache à l’avance où et quand on arrivera, avec quels moyens ; les balises du projet sont connues, qui permettront, on l’espère, de minimiser l’impact des mauvaises surprises éventuelles. Le cycle en V inspire le modèle ADDIE (Analyse, Design, Développement, Implémentation, Evaluation) utilisé par les services formation, par exemple, dans le projet de réalisation d’un module e-learning traditionnel, le « storyboard » étant une des balises mentionnées plus haut. Mais, dans la vraie vie, un tel projet est loin de ressembler à cette aimable description.
- Le mode Agile : Initialement issu du secteur du logiciel, il s’applique aujourd’hui à toutes sortes de projet. Les 12 principes du Manifeste Agile privilégient la satisfaction du client, la capacité à accueillir positivement les imprévus, les petites réussites pas à pas, la collaboration continue des parties prenantes, le dialogue face à face plutôt que la paperasserie, la simplicité, etc. Agile semble mieux adaptée à l’air du temps. Puisque « Le début ne laisse pas présager la fin » (Hérodote, il y a vingt-cinq siècles…), autant se confier à la collaboration des parties prenantes, à la résolution des problèmes au fur et à mesure où ils se posent, à la qualité de la relation dans l’équipe projet ; autant s’en remettre à l’engagement des acteurs sur le cap à suivre plutôt qu’aux spécifications tatillonnes d’un livrable décidément bien difficile à prévoir : Agile est indispensable dans les transformations en cours dont l’expression des besoins tient plus, en effet, d’une vision partagée que d’un cahier des charges en bonne et due forme !
L’exemple du « projet LMS »
Le projet d’acquisition d’une plateforme de formation permet d’illustrer qu’il faut doser les deux approches.
Comment se passer ici du Cycle en V, alors que le projet ne saurait se dispenser d’un budget, d’un délai (le lancement du portail de formation), qui sont les éléments clés du contrat avec la direction et les clients internes. Un projet qui doit s’appuyer sur des jalons intermédiaires, sauf à se disperser, et, plus encore, qui doit prendre en compte les services prioritaires (must have) attendus de la plateforme, la livraison des autres services (nice to have) étant distribuée dans le temps (batch).
Mais, l’approche agile est aussi requise, car la réussite d’un projet de plateforme LMS dépend de la cartographie du tour de table, de la capacité de l’équipe projet à revoir et renégocier sa copie avec les parties prenantes en fonction des événements qui ne manquent pas de survenir, Agile se manifestant dans l’accueil fait à ces événements : source d’opportunités auxquelles on n’aurait pas pensé, et qui pourraient enrichir le projet, plutôt qu’obstacles au projet.
Compétence projet élargie
Ce qui précède montre que la fonction formation n’a guère le choix : selon la nature du projet qu’elle pilote (maîtrise d'ouvrage) ou auquel elle contribue, elle privilégiera le Cycle en V ou l’approche agile. Mais, dans tout Cycle en V, elle s’assurera d’user des principes du Manifeste Agile ; réciproquement, l’Agilité ne devra pas être au détriment d’une rigueur qu’on voit à l’œuvre dans le Cycle en V, car, projet ponctuel ou projet de transformation continue (jamais terminée), il ne s’agit pas d’oublier qu’en bout de course « quelque chose » doit être livré à temps !
La compétence de conduite de projet va donc bien au-delà de ce qu’on imagine parfois. On parlera de « compétence projet élargie » dont l’acquisition s’impose à tout professionnel de formation, ne serait-ce que pour mener son propre Projet de transformation (consistant en un ensemble de projets qui se recouvrent en partie).
Volet 1
Volet 2
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