Le développement des power skills conditionne la performance, aujourd’hui et demain, du groupe Alstom. Franck Gaillard (Global Learning Director, Alstom) et ses équipes y accordent le plus grand soin en généralisant le principe de l’autoévaluation via CK Connect (CrossKnowledge) dont sortent des recommandations individuelles de formation… Le succès de l’approche est patent, dans une entreprise (est-ce un hasard ?) qui se porte bien…
Quelle est l’utilisation de CK Connect, une solution de Crossknowledge, chez Alstom ?
Franck Gaillard : CK Connect est utilisé par la direction corporate learning d’Alstom en tant qu’outil d’autoévaluation des « power skills » de nos collaborateurs et de recommandation des formations en ligne à suivre à partir des résultats de cette autoévaluation. Cette autoévaluation peut être rapprochée, si le collaborateur l’accepte, de celles de ses collègues et de son manager, pour aider chacun à « mieux fonctionner » dans l’équipe, en décidant des ajustements comportementaux proposés à tous les autoévalués. Ce dispositif s’éloigne de la façon dont le feed-back est habituellement mené, parce qu’il n’est ni subi ni intrusif, le collaborateur pouvant conserver les résultats de son autoévaluation pour lui-même, et parce qu’il est plus juste et plus efficace dans la mesure où l’ensemble des collaborateurs et des managers sont conviés à l’utiliser et à viser les améliorations individuelles qui déboucheront sur une meilleure collaboration dans les équipes.
À quels enjeux spécifiques à Alstom répond CK Connect ?
Franck Gaillard : La stratégie RH d’Alstom vise à développer le leadership partout et à tous les niveaux du groupe. Aujourd’hui et demain. Aujourd’hui, parce que le groupe est en pleine croissance, organique et externe, notamment avec l’acquisition de la Division Transport de Bombardier. Demain, parce que les marchés et le monde du travail changent rapidement, et parce que tout collaborateur doit posséder les power skills qui lui permettront de saisir les opportunités de développement et d’emploi existant dans le groupe. Il s’agit de rendre visibles les opportunités et les compétences que nos collaborateurs doivent construire pour les saisir, et de créer le désir d’acquérir ces compétences, ce que traduit la notion d’empowerment difficile à traduire en français. Cette démarche trouve sa place dans une réflexion plus large sur les valeurs - agilité, inclusion et responsabilité - qui constituent la culture du Groupe. En particulier, l’inclusion permet de rassembler les collaborateurs autour du projet Alstom, et d'aider chacun à mieux s’adapter aux autres, à faire confiance. L’idée, c'est bien celle que chacun devienne un leader.
Quelle est l’adhésion des collaborateurs à cette démarche qui n’est pas obligée ?
Franck Gaillard : 99 % des collaborateurs qui s’engagent dans cette démarche se disent très satisfaits, en particulier parce qu’à la fin du questionnaire d’autoévaluation, ils reçoivent leur profil et bilan personnels. Cette démarche étant volontaire, de l’ordre de l’intime, elle a pu compter sur les effets du bouche-à-oreille : 13 000 collaborateurs, dont une proportion plus importante de cadres, ont à ce jour passé leur test ; une partie des autoévalués ont de plus comparé leurs résultats à ceux de leurs collègues et de leur manager.
CK Connect débouche sur des recommandations de formation ?
Franck Gaillard : La formation joue un rôle essentiel. C’est elle qui permet à chacun de s’engager dans cette démarche d’amélioration, via en effet le suivi des recommandations proposées par CK Connect qui puise dans le portail de formation Discovery Challenge, largement utilisés dans le Groupe : plus de 140 000 heures de formation en 2 mois suivies par plus de 50 000 apprenants depuis le début de 2021, dans un groupe qui emploie 75 000 salariés dans 70 pays ! Dans cette vaste population, les participants au programme CK Connect sont bien représentés, puisqu’ils ont tous suivi au moins un parcours de formation à l’issue de leur autoévaluation, certains programmes pouvant durer jusqu’à 20 h en cumulé. Ce niveau de consommation est favorisé par la possibilité de jouer les ressources sur smartphone ou tablette aussi bien que sur PC.
La formation pour tous, un changement de paradigme chez Alstom ?
Franck Gaillard : C’est le choix que nous avons fait en 2016 : celui d’ouvrir les vannes de la formation : nous sommes passés de 2 500 salariés formés alors annuellement à 50 000 aujourd’hui. Dans le même temps, notre université d’entreprise est fortement montée en puissance, avec aujourd’hui 50 % des heures des formations à son actif. À l’expérience nous n’avons pas pris grand risque à multiplier les accès à la formation, car on constate que les collaborateurs sont toujours très pertinents dans le choix de leurs formations qui prennent étroitement en compte le métier qu’ils exercent, notamment les évolutions technologiques prévisibles dans leur métier. Alstom est un bon terrain de validation des principes de l’andragogie !
Comment s’articule la plateforme CK Connect et le portail de formation lui-même construit avec la technologie et les contenus CrossKnowledge ?
Franck Gaillard : Du point de vue de l’utilisateur, la transparence est complète via une connexion SSO : on passe de l’autoévaluation sur CK Connect et de ses recommandations aux formations figurant dans le portail, de façon transparente.
Quel est l’impact du programme CK Connect et des formations associées sur l’évolution du capital humain chez Alstom ?
Franck Gaillard : Il est toujours délicat d’évaluer l’impact des formations. On est en droit de se poser la question : quel est l’impact de la formation sur la progression des trois valeurs - agilité, inclusion, responsabilité - et, bien entendu, quel est l’impact de ces valeurs sur la marche de l’entreprise ? La forte progression de nos revenus depuis plusieurs années en est sans doute un révélateur… Mais, on peut aussi en voir les effets dans la situation de crise extrême qui s’est développée avec la pandémie. La valeur d’agilité, par exemple, s’est illustrée par le transfert quasi immédiat des cours en salle, qui représentaient 60 % de notre budget de formation, vers des classes virtuelles utilisant Teams et Klaxoon. Le moins qu’on puisse dire, c’est que nos formateurs ne pouvaient faire preuve d’une plus grande agilité. De même on a vu se développer fortement les thématiques du bien-être au travail, de la préparation au travail hybride, et même de programmes de relaxation utilisant la réalité virtuelle. Nous ne renonçons pas pour autant à évaluer précisément l’impact de la formation à court ou à moyen terme ; en particulier, nous avons bien l’intention de mettre en évidence les corrélations existantes entre la formation et le développement des compétences comportementales.
Propos recueillis par Michel Diaz
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