Le raz de marée des classes virtuelles tient en un chiffre : 77,4% des entreprises françaises les ont utilisées depuis le début de la crise (L’impact de la Covid-19 sur la formation dans les entreprises européennes, Féfaur- Talentsoft, automne 2020).
Cette accélération est certes à mettre au compte de l'impossibilité de suivre un cours présentiel pendant le confinement ou en télétravail ; elle a aussi été rendue possible par la disparition, qui ne date pas d'hier, d'une partie des obstacles qui se dressaient devant les classes virtuelles.
Le terrain avait en effet été largement déblayé :
- Les bandes passantes ne sont plus un obstacle. Elles le seront toujours moins, avec le développement attendu de la fibre et de la 5G dans les environnements professionnels ou à domicile, ainsi que la volonté des entreprises et des pouvoirs publics de faciliter le développement du télétravail et donc de la téléformation (lutte contre les déserts régionaux, lutte contre le réchauffement climatique, nouvelles aspirations individuelles à vivre hors les grandes métropoles…).
- Les éditeurs de solutions ont pris la mesure des besoins en classe virtuelle. Certains ont créé des « fonctionnels » spécifiques, notamment en délivrant rapidement des solutions logicielles pour distancialiser le présentiel ; la plupart ont amélioré l’intégration de leur solution (LMS, LXP) avec des plateformes spécifiques de classe virtuelle. Des plateformes de collaboration en ligne se sont mises à l’heure des classes virtuelles en créant des services qui n’existaient pas jusqu’alors ; Teams en est un bon exemple, avec ses fonctionnalités d’ateliers, d’amphithéâtre… jusqu’à son intégration dans la nouvelle stratégie Microsoft Viva Learning, qui offre aux éditeurs de plateformes de formation ou de catalogues de contenus sur étagère la possibilité de s’y intégrer à leur tour.
- La classe virtuelle prend le pas sur l’autoformation en ligne : forcés de se former à distance, désireux de maintenir un contact vivant avec leur entreprise et leurs pairs, les apprenants ne sauraient se contenter d’une autoformation / consommation en ligne de contenus pédagogiques digitaux qu’ils toléraient quand la perspective du présentiel existait encore. Les MOOCs pourrait souffrir de cette évolution vers le « live learning » : même bien filmé, et aussi bien scénarisé soit son cours, un formateur enregistré ne peut remplacer ce qui se joue dans le cadre d’une classe virtuelle - le champ du MOOC se restreindra, comme complément de la classe virtuelle, dans une ingénierie pédagogique à récrire.
- La concurrence du présentiel a disparu temporairement, ce qui a permis de faire la balance avantages / inconvénients entre les deux modalités principales, présentielle et distancielle, du « live learning ». Contrairement à ce qu’on pouvait croire, il est possible, dans une certaine mesure, de se former à distance en direct au geste, aux spécificités des métiers de l’entreprise, voire de développer ses softs skills… sans atteindre toutefois la richesse et la profondeur des interactions de certaines formations délivrées en présentiel.
- Le scepticisme des formateurs s’est beaucoup atténué. La contrainte économique qui a pesé sur eux, la disparition du présentiel portant un risque majeur pour leur activité, cette contrainte les a poussés à remettre en cause une partie de leur croyance qu'il n'y avait point de salut hors le cours présentiel, et à se former à la conception et à l’animation des classes virtuelles. Beaucoup de pragmatisme dans cette démarche, et de capacité d’adaptation, aidés par l’émergence d’une offre de formation intelligente et multiple. Il aura fallu cette crise pour que les quelques formateurs encalminés dans leur zone de confort passent à l’action. Cette simple disposition leur permet d’entrevoir un avenir moins sombre ; au contraire, dotés de nouvelles compétences, et d’une vision élargie de leur métier, ils sortent grandis de l’épreuve.
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