Rencontre (décoiffante) avec Nicolas Hernandez (co-fondateur, CEO, 360Learning) autour d’acronymes qui peuvent donner le tournis… On comprend que les responsables de formation aient parfois du mal à s’y retrouver… Essai de clarification.
Commençons par 360Learning… Plateforme LMS, Learning Experience Platform (LXP), plate-forme de « Collaborative Learning »… ?
Nicolas Hernandez : 360Learning, c’est un peu tout ça ! Si ça ne tenait qu’à moi, on abandonnerait ces acronymes souvent imposés par les offreurs pour différentier de leur concurrence… 360Learning, c'est en fait une plateforme de formation axée sur l’apprentissage collaboratif, qui possède toutes les fonctionnalités dont les entreprises ont besoin. Je tiens à cette distinction : ce n’est pas en termes de catégories de plateforme qu’il faut raisonner, mais de fonctionnalités.
Commençons donc par les fonctionnalités d’une plateforme LMS…
Nicolas Hernandez : Difficile d’en parler sans mentionner la norme Scorm qui permet de faire communiquer d’une part, les contenus en Flash créés avec des outils auteurs compatibles Scorm, et d’autre part les plateformes elles-mêmes « scormées ». On est déjà un peu dans l’ancien monde, non ? Si certains de ces contenus continuent d’exister (mais rarement d’être maintenus), c’est qu’ils ont pu coûter une fortune à développer… Evidemment 360Learning est compatible avec SCORM, mais nous allons beaucoup plus loin. Si la formation est aujourd’hui en train de passer massivement à des contenus en HTML5, la structure rigides des LMS historiques ne leur permet pas d’ajouter les fonctionnalités collaboratives qui sont la marque de fabrique de 360Learning.
Il y a donc LMS et LMS ! Ce qui prouvent bien que ces acronymes ne décrivent plus la réalité du marché. Le péché originel des plateformes LMS, c’est d’être issues d’un monde où la formation était une ressource rare, délivrée de façon centralisée par le département formation, selon des processus de gestion contraints par des règles administratives draconiennes… L’engagement des apprenants n’était vraiment pas l’objectif principal de ces plateformes essentiellement dédiées à diffuser massivement, sans nuance, des ressources d’auto-formation en ligne.
Un manque comblé par les LXP ?
Nicolas Hernandez : Oui : au contraire des LMS conçus pour les administrateurs, les Learning Experience Platforms proposent l’expérience d’utilisation qui est attendue par les apprenants et les managers. Il y a là, toutefois, un abus de langage, car ces plateformes sont loin de couvrir tout le champ de l’expérience d’apprentissage pour se concentrer essentiellement sur l’expérience de diffusion des contenus. Ce qu’elles font bien, comme on peut le constater sur des plateformes qui empruntent l’interface de Netflix voire d’Amazon, pour diffuser des contenus tiers qui sont aussi diffusés via les LMS : Coursera, Udemy ou HarvardX, etc. Elles sont censées pouvoir faire des recommandations individualisées de contenus, mais on est ici très loin du compte, faute que ces plate-formes, et plus généralement l’ensemble de l’écosystème digital de formation, puisse disposer de toutes les données - celles de l’utilisateur comme celles de ses amis - qu’on trouverait par exemple sur Facebook ou Amazon.
Est-il souhaitable que l’entreprise dispose de ces données ?
Nicolas Hernandez : Un LXP d'entreprise ne dispose pas de ces informations, et c’est tant mieux ! Si les données sont « l’or de l’Internet grand public », dans l’entreprise elles sont au contraire potentiellement de la dynamite. Quelle entreprise, quel collaborateur voudrait que leurs données alimentent réciproquement des systèmes d'entreprises tierces ? Pour que l’IA tienne ses promesses, elle a besoin d'un accès illimité aux informations de votre employé, à ses calendriers, à ses évaluations de performance et aux données de géolocalisation, ainsi qu'à des présentations commerciales, aux données CRM et plus encore. Alors, oui : chaque personne pourrait se voir à tout moment recommander la bonne micro-formation… Mais on peut en concevoir de l’inquiétude ! Faute de ces données, ne comptez pas sur un niveau de précision similaire à Amazon ; au contraire, vous serez principalement dirigé vers le contenu proposé à tous ceux qui ont le même intitulé de poste !
On est loin d'une plateforme qui promet de supporter « l’up skilling / re skilling » de la main d’œuvre…
Nicolas Hernandez : C’est pourtant l’objectif des Suite de Talents et des plateformes LXP. Il s’agit de mesurer le “skill gap”, et d'essayer de le combler grâce à des recommandations basées sur l’intelligence artificielle.
Faut-il alors que les entreprises multiplient les types de plateforme ?
Nicolas Hernandez : Soyons réalistes ! Il est vraisemblable qu’une organisation relativement importante, sans doute à partir de 30 000 employés, aura besoin d’une Suite de Talent intégrée à une plateforme d’apprentissage dédiée (comme 360Learning) avec laquelle l’équipe formation pourra travailler au quotidien pour démultiplier notamment sa productivité digitale. Pour acquérir cette Suite de Talent, elle n’aura que l’embarras du choix. Mais attention : on voit certaines entreprises multiplier aujourd'hui les Suite de Talent, jusqu'à utiliser parfois deux (voire trois) leaders de marché, par exemple SAP SuccessFactors et Degreed ! Qui ne voit que c'est un double emploi ? Chez 360Learning on ne s'en formalise pas vraiment, mais quand il s’agit ensuite d’intégrer notre solution, ce double emploi peut créer de la confusion car parfois ces entreprises ne savent plus vraiment quelle est leur Suite de Talent principale, et comme toutes ces suites proposent de plus une LXP, l’utilisateur final finit par s'y perdre... Quant aux entreprises de moins de 30 000 collaborateurs, en général elles s’équiperont prioritairement d’une plateforme de formation comme 360Learning avant d'acquérir une Suite de Talent (c'est pourquoi 360Learning s'intègre avec tous les leaders du marché). Ce choix de s'équiper d'abord du'une plate-forme de formation résulte de la nécessité de répondre le plus rapidement possible à des besoins de formation spécifiques, au plus près des situations de travail, en impliquant donc les experts métiers qui devront être dotés d’un outil auteur simple et collaboratif à même de mobiliser l’intelligence du terrain.
Propos recueillis par Michel Diaz
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