La crise du Covid-19 contribuera fortement à la digitalisation accélérée du travail et de la formation, mais cette transformation devra se faire de manière responsable.
Prendre conscience de l'impact environnemental du digital pour éviter de contribuer aux prochaines crises
L'impact environnemental de nos modes de vies a permis l'apparition et la propagation du Covid-19.
Le monde post Covid-19 sera plus digital, c’est une certitude. Les semaines de confinement ont contraint même les plus réticents à prendre le virage du digital à vitesse grand V.
Toutefois cette crise nous apprend également que nous ne pouvons plus continuer à vivre comme avant. En effet, des liens entre nos modes de vie, leur impact sur l'environnement et l’augmentation des risques sanitaires tels que l'actuelle pandémie, ont été mis en évidence.
Dans ce contexte, les acteurs du digital ont une responsabilité énorme et ne peuvent pas se contenter de simplement répondre à la demande croissante de leurs solutions. Car il ne faut pas que la transition digitale soit aux dépens de la vraie transition, celle que nous ne pouvons pas rater : la transition écologique.
Le digital émet aujourd’hui plus de gaz à effets de serre (GES) que l'aviation civile.
La transition digitale fait en effet payer un lourd tribut à notre Planète - la fabrication d'un ordinateur de 2 Kg mobilise 800 Kg de matières premières et génère 124 Kg de CO2, une box Internet a la consommation électrique annuelle d'un réfrigérateur, etc. Le secteur du digital, qui est aujourd'hui accusé de générer 4% du total des GES dans le monde (davantage que le transport aérien civil), pourrait voir cette part doubler d'ici 2025 (il aurait alors le même niveau d'émission que le parc automobile). Par ailleurs, sa consommation d'énergie augmente de 9% par an.
Pour préparer le monde d'après, plus sobre et responsable, il est urgent de s'interroger sur les externalités négatives que toute activité génère et d'apporter des solutions. C'est un peu la fameuse métaphore du Colibri de Pierre Rabhi, chacun peut (et doit) faire sa part.
Des pistes des réflexion pour les acteurs du Digital Learning et de la formation
En formation comme ailleurs, le digital ne doit pas être une fin en soi.
Le recours au digital doit se justifier par la valeur ajoutée concrète qu'il apporte à une formation. Le digital a un intérêt lorsque le public cible est dispersé géographiquement. Il est formidable pour diffuser un contenu de manière rapide et homogène, et répondre à des besoins de formation en temps quasi réel (confère la vitesse à laquelle ont fleuri les formations en ligne sur le télétravail ou la gestion d'équipe à distance). Lui seul permet de réaliser des simulations complexes ou dangereuses. Enfin, il facilite l'ancrage des connaissances grâce à la répétition. En dehors de cela, le présentiel (ou a minima le blended) devront continuer à être privilégiés.
Le choix des formats doit être réfléchi pour limiter l'usage de la vidéo en ligne.
Le très populaire format vidéo est aujourd'hui dénoncé pour son impact : 10h de film haute définition, c’est davantage de données que l’ensemble des articles en anglais de Wikipédia en format texte ! Il importe donc de challenger l'usage croissant de la vidéo dans les parcours de formation digitale par des formats alternatifs (infographie, fiches d'aides etc) tout aussi efficaces, et d'en limiter la durée ou encore la qualité de diffusion.
Les technologies de formation doivent être écoconçues pour réduire leur impact.
Si la moitié des GES du numérique sont attribuables aux équipements des utilisateurs, l'autre moitié est due aux data centers et aux infrastructures de réseau. Un fournisseur de solutions de digital learning devrait donc évaluer son impact écologique, des serveurs où il stocke ses données jusqu'au mode de développement de ses technologies, à l'heure où nous parlons de plus en plus d'écoconception numérique.
Derrière chaque formation se cache la possibilité d'accompagner concrètement la transition vers des métiers et un monde plus durables... ou pas !
Cette dernière question, celle du fond, est la moins évidente mais peut-être la plus cruciale. Elle s'adresse à tous les professionnels de la formation en général : quel type de projets souhaitons-nous servir ? Développer des compétences qui permettent de faire la transition écologique au sein de secteurs qui doivent se transformer ? Ou les aider à se maintenir dans le monde actuel, et avec eux leur impact environnemental insoutenable ? Si Nelson Mandela disait que "l'éducation est l'arme la plus puissante pour changer le monde", alors appliquée à des projets peu vertueux, ne peut-elle pas également être une arme de destruction massive ?
|