Nombre d'entreprises confient à leur Direction Formation le soin de maintenir le lien et les compétences de leurs collaborateurs en télétravail en les abonnant à des catalogues de formation en ligne. Une opportunité que les offreurs de digital learning ont comprise, mais qui doit s'accompagner de quelques précautions, sauf à courir le risque d'une désillusion lourde de conséquences !
Des budgets de formation en berne ?
La crise sanitaire plonge les entreprises dans une grande incertitude à court et moyen terme. Leur réflexe, c’est de réduire un certain nombre de leurs budgets qui étaient prévus cette année. Le budget formation n’y échappe pas, pour une autre raison : l'annulation pour cause de confinement des cours en salle, qui consomment encore l’essentiel du budget formation, vient diminuer considérablement celui-ci.
Digital learning : la demande en plein boom
La demande de digital learning est portée par la volonté des entreprises de maintenir le lien avec leurs collaborateurs en télétravail, ainsi que leurs compétences tout au long de cette période. Les collaborateurs en chômage partiel sont susceptibles eux aussi de bénéficier de ces formations grâce à des nouveaux financement publics exceptionnels. On ne s'étonnera pas qu'une partie du budget formation soit ainsi transférée du présentiel au digital learning.
Depuis le début du confinement, les entreprises s’activent donc à déployer des offres de formation en ligne pour leurs collaborateurs en télétravail. Sont principalement choisies des formations transversales (soft skills notamment), censées préparer le “futur du travail” dont on peut toutefois se demander à quoi il ressemblera, post Covid-19. En particulier, que vont devenir les projets de “re / up skilling” des collaborateurs qui étaient au centre des préoccupations récentes des Directions Learning & Development ? Quelles seront les compétences clés de “l’après” ? Le travail à distance étant sans doute amené à se développer, on peut imaginer que les compétences qui permettent de créer et d’enrichir le lien humain vont prendre de l’importance.
Face au boom de la demande, les offreurs adoptent deux logiques plus ou moins complémentaires. Première logique : les fournisseurs de digital learning tentent de convaincre les Directions Formation que leur offre, catalogue et services, est à même de répondre à leur besoin de maintenir le lien et les compétences. Deuxième logique : d’autres acteurs - mais ce sont parfois les mêmes - tentent de traiter directement le marché des actifs, via des cours en ligne gratuits qui peuvent s’apparenter à du “freemium” préparant à des abonnements payants potentiellement soutenus par le CPF et les financements dérogatoires qui viennent d’être annoncés.
Le risque d’une désillusion vis-à-vis du digital learning
Si les opportunités sont réelles, les risques de désillusion existent. D’abord parce que l’objectif de maintien d’un lien et de développement “abstrait” des compétences ne suffit pas à ancrer la formation dans les attentes des apprenants, qui sont le plus souvent celles d’un meilleur confort et d’une performance plus élevée en situation de travail. Ensuite, même si le catalogue est bien choisi, encore faut-il que les formations soient individuellement accompagnées, ce qui est loin d’être toujours le cas.
Le risque pour le digital learning serait alors d’être considéré par les apprenants comme de la “sous-formation” pour temps de crise, avec un retour à la “vraie formation” quand les beaux jours reviendront. Ce risque se doublerait, pour les Directions Formation, d'un effet de ciseau : des salariés demandant des formations présentielles, alors que les dirigeants de l’entreprise voudraient plus de digital learning dont ils auraient observé qu’il permet de réduire les coûts de formation unitaires.
Prendre ses précautions
Former pour maintenir le lien et développer des compétences en réduisant ces risques, c’est possible ! Il suffira de s'armer de quelques précautions :
- Bien choisir le catalogue de formation "temporaire", si possible en faisant appel à un fournisseur unique, à même de couvrir le plus vaste spectre de besoins génériques ;
- Vérifier que ce catalogue / cette plateforme pourront être opérationnels très rapidement, car le confinement n’a pas vocation à durer des mois ;
- S’assurer que les apprenants pourront bénéficier d’un service d’accompagnement individuel digne de ce nom (cette exigence donne une prime aux offreurs présents sur le marché des particuliers, pour qui ce service est indispensable) ;
- S’assurer que ce catalogue de formation pourra s’intégrer à terme avec celui des contenus sur mesure développés dans les métiers de l’entreprise ;
- S’assurer de la capacité des plateformes en jeu (celle qui supporte le nouveau catalogue générique, celle qui existe déjà dans l’entreprise) à s’intégrer facilement (prime aux plateformes LMS déjà installées, qui proposeraient une market place de contenus de formation).
Dernière recommandation : le gratuit c’est bien, mais en faire le principal critère de choix serait une erreur lourde de conséquence, en particulier si le fournisseur dont l’offre de formation a été temporairement choisie est destiné à perdurer bien après la crise sanitaire dans le dispositif de formation !
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