La compétitivité des organisations passe aujourd’hui par leur “transformation digitale” dont la réussite est conditionnée par le niveau de culture digitale de l’ensemble des collaborateurs. Spécialiste de ces questions, Elodie Primo (CEO, MOS-MindOnSite) rappelle le rôle que la formation est amenée à jouer dans ce vaste changement, et la nécessité qu’elle s’appuie sur une stratégie différenciée…
CIO (directeurs informatiques) et CMO (directeurs marketing) ont à vendre la transformation digitale aux autres membres de la “C-suite” (le top management). Cette responsabilité est telle que 20% environ des 2 500 plus grandes sociétés mondiales ont ajouté un nouveau rôle à leur C-suite, celui de CDO (directeur du digital), qui doit s’appuyer sur le DLM (Digital Learning Manager) en charge des programmes de formation attachés à ce vaste changement.
Commencer par un “POC” pour prouver le “ROI” !
Comme tout autre domaine de la transformation digitale, le digital learning doit démontrer que ses investissements sont rentables, c’est-à-dire qu'il a un impact positif notamment sur la performance interne ou la qualité de l’expérience client. C’est en croisant les résultats de la formation avec ceux du business, qu’on arrive à démontrer le “ROI” de la formation, et donc à décrocher ou préserver ses budgets, sinon à obtenir qu’ils augmentent !
Cette démonstration doit se faire pas à pas ; en particulier, il est préférable de démarrer par un “POC (Proof of Concept, “preuve que c’est faisable”) sur un périmètre (thématique et population-cible) volontairement restreint. Pour ce qui concerne les thématiques, il faut noter que selon LinkedIn, la C-suite s’intéresse aux formations portant sur les ventes et le marketing, la gestion de projet, la gestion du temps et le leadership, alors que l’entreprise a tendance à privilégier les contenus internes sur les produits et processus dans ses portails de formation.
Prendre en compte le contexte spécifique de votre entreprise
Par ailleurs, une stratégie digital learning a tout à gagner en implémentant le modèle 70-20-10, qui identifie 3 dimensions dans l’apprentissage : 70% sous forme de pratique quotidienne, 20% dans des interactions sociales et 10% dans le cadre de formations formelles. Ce modèle a évolué, notamment avec l’usage des outils digitaux : il serait plus proche d’un “55-25-20” d’après une étude de Training Industry en 2018 (“Deconstructing 70-20-10”). Il apparaît aussi que les managers accordent plus d’importance à la formation formelle - le ratio pour les cadres supérieurs s’affichant à 40-30-30. Ces indications ne doivent pas être prises au pied de la lettre, et elles peuvent varier d’une entreprise à l’autre en fonction de l’efficacité de la formation formelle. De même, dans des équipes performantes, les employés se formeront plus naturellement en se tournant vers leurs pairs (social learning).
Le contexte constitue donc un facteur majeur à prendre en compte dans la définition et le pilotage de la stratégie learning. On peut aussi relever d’autres caractéristiques. Par exemple, la formation au poste de travail revêt une importance particulière dans des grandes entreprises où la moyenne d’âge est plus élevée, la performance opérationnelle moindre et le système de formation formel plus faible. A contrario, le social learning l’emporte quand les employés sont plus jeunes, les équipes performantes… et la formation formelle efficace. La formation formelle constituerait donc une solide fondation à la formation informelle ; ce qu’on peut aussi constater dans les plus petites entreprises qui privilégient le stage traditionnel.
Prendre en compte le parcours du collaborateur et miser sur les compétences opérationnelles
Piloter la stratégie digital learning requiert aussi de prendre en compte le parcours du collaborateur dans l’entreprise : pré-recrutement, recrutement, accueil dans l’entreprise, entrée en fonction, travail quotidien et formations continues.
Prévoyez une palette de ressources pédagogiques aussi large que possible : sessions au poste de travail (LMS local, micro-learning, mobile-learning, video-based learning, webinars, etc.), pratiques informelles (centre de support, on-demand learning, recherche, base de connaissances, etc.), partage de connaissances (communautés de pratique, user-generated content, etc.).
Le manager occupera une place essentielle dans le pilotage des formations au plus près du terrain : inscriptions en fonction du ciblage des compétences, démarche AFEST (action de formation en situation de travail au niveau local), accompagnement de la montée en compétences.
Enfin, il faut miser sur les compétences opérationnelles grâce à l'intégration de dispositifs innovants (Phygital, Apps, VR, etc.) et à un suivi global des apprentissages, couvrant les activités LMS… et celles qu’on peut lui attacher !
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