Derrière le "badge-gadget" qui a commencé d'envahir les portails de formation, une véritable tendance, et un vaste champ d'opportunités pour les entreprises et les collaborateurs, comme le rappelle Serge Ravet en prélude à son intervention au Séminaire Stratégies d’Évaluation Formation Féfaur 2019+.
Un badge de formation, qu’est-ce que c’est ?
Serge Ravet : Un Badge est un “instantané” de la reconnaissance, il capture dans une image l’information relative à la reconnaissance d’une compétence, d’un engagement ou d’une réussite. Il peut être émis ou demandé par tout un chacun. L’expérience montre qu’il est en général préférable que ce soit la personne qui soit à l’initiative, qu’elle ait la possibilité de revendiquer ("claim" en anglais) un badge plutôt que le recevoir sans l’avoir demandé. Il y a aussi des expériences intéressantes où les personnes peuvent "recommander" une autre personne pour un badge, ou participer à la validation d’une demande de badge. Certaines plates-formes de gestion des Open Badges permettent de configurer les règles d’émission suite à une demande de badge, par exemple "pour valider la demande du badge "XYZ", il faut faudra qu’elle soit validée par au moins 5 personnes possédant le badge "XYZ" et "WXY"".
Pourquoi est-ce qu’on parle de plus en plus des badges ?
Serge Ravet : Les outils traditionnels de gestion RH, comme les référentiels de compétence, sont mis à mal dans un monde où, comme le prédit l’Institute for the Future "85% des emplois que les apprenants d’aujourd’hui occuperont en 2030 n’ont pas encore été inventés". Cela ne veut pas dire qu’il n’y aura plus de "référentiels" mais que ceux-ci devront être bâtis autrement, un peu à la manière d’Open Street Map, invitant les praticiens des métiers en émergence (comme le métier de curateur), une sorte de référentiel dynamique. Et les badges sont l’outil parfait pour cela. Ils sont aussi un puissant instrument de gestion des talents. C’est un objet simple, une image et des métadonnées, qui peut être exploité par de nombreux services, comme un tableau de bord affichant en temps réel et aux yeux de tous les collaborateurs les compétences disponibles, en cours de développement ou en demande dans l’entreprise. C’est aussi un outil pour afficher aux yeux de ses clients les compétences de l’entreprise.
Est-ce que les badges vont remplacer les diplômes ?
Serge Ravet : Les badges ne sont qu’un véhicule, et ils peuvent transporter tout aussi bien de l’information relative à une reconnaissance formelle (un diplôme), ce que certaines université commencent à utiliser, que de l'information relative à une reconnaissance informelle (un endossement) au sein d’une communauté professionnelle. Les Open Badges permettent d’unifier les supports de toutes les formes de reconnaissance. La diversité actuelle des supports d’information sur les talents et compétences, c’est un peu comme si pour transporter des pommes de terre on exigeait des véhicules qu'ils aient la forme de pommes de terre, des transporteurs de carottes qu'ils soient en forme de carottes, etc. !
Quel conseil pour un service formation-RH qui voudrait lancer son dispositif ?
Serge Ravet : S’informer sur ce qui se fait déjà, par exemple chez IBM, et penser les badges comme un outil de transformation des outils et des process. On peut bien sûr utiliser les badges pour ce qu’on fait déjà, et qui peut être ainsi amélioré à la marge, mais le véritable bénéfice des badges ne sera visible qu’en repensant les outils et process de gestion et développement des ressources humaines. Une étude récente indiquait que près de 40% des personnes pensent avoir des compétences supérieures à ce qui est demandé dans leur emploi. La question n’est pas tant de savoir si elles ont raison ou tort que de prendre conscience qu'il y a là un énorme potentiel de frustration dû à un manque de reconnaissance, mais aussi une source de compétences qui pourraient être activées au bénéfice de l’entreprise - une autre étude indique que le niveau d’activation des compétences est de 58% en France alors qu’il est de 87% en Suède.
Propos recueillis par Michel Diaz
Actualité :
Serge Ravet interviendra au 5ème Séminaire annuel Féfaur sur l’évaluation de la formation, le 28 mars 2019 à Paris. Une centaine de décideurs formation-RH sont attendus sur la thématique "Construire et déployer votre stratégie d’évaluation de la formation” traitée par les meilleurs experts et praticiens du domaine.
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