Forte pression sur les responsables formation. D’abord celle des Directions pour qui digitaliser les contenus doit permettre de réduire les coûts, de gagner en souplesse, de rajeunir l’image d’un service formation… Celle des apprenants, qui, cinquante ans après mai 68, refusent de rester sur les bancs à écouter le professeur émérite : ils veulent bouger, partager, et surtout consommer de la formation en mode ATAWADAC, ce qui transforme le learning manager en une sorte d’aiguilleur du ciel : MOOC, SPOC, mobile learning, plateformes, capsules, quiz… De la nécessité de rappeler quelques mirages du digital learning, pour atterrir en douceur…

“Enfin, on va pouvoir former tout le monde. Y’a qu’à mettre en ligne !”

Le digital learning est un moyen très efficace pour diffuser à grande échelle : ancrer des messages, expliquer, donner des perspectives et se mettre à jour. Cependant, même les apprenants les plus digitaux dans leur vie privée, ne se jettent pas sur l'offre digital learning de leur entreprise. Parce qu’ils ne connaissent pas le dispositif existant, ou parce qu’ils n’ont pas envie de se former sur le sujet donné (par exemple).

Enseignements : définir un plan de communication cohérent à déployer par étape. Identifier un sponsor charismatique pour donner du sens, faire du lancement un événement, créer une campagne de communication avec des supports variés (mailing, posters, Genius bar, goodies…), imaginer des challenges, battles. En parler partout et à tout moment !

“J’ai plein de contenus disponibles, on n’a qu’à les transformer en modules e-learning !’’

D’anciens supports de formation présentielle transformable vite fait bien fait en contenus pédagogiques digitaux neufs, le tout à moindre coût ? Illusion : s’il existe des outils pour animer des Powerpoint, ajouter interaction et voix off, les résultats restent le souvent médiocres… Je continue de rechercher l’outil miracle, rapide à prendre en main, dont les résultats seraient vraiment professionnels.

Enseignements : digital ne rimant pas forcément avec rapidité, digitaliser des contenus suppose de redéfinir les objectifs de formation, de réaliser un storyboard, de consacrer le temps nécessaire à la conception et de disposer d’outils auteur faciles à apprivoiser pour publier sur la plateforme LMS. Format vidéo à privilégier, compte tenu de son efficacité ; j’utilise fréquemment la solution #pitchy et son jeu de templates.

“On saura tout sur tout le monde’’ (Big Brother is back !)

La remontée des données statistiques rassure la direction générale, car elle peut à juste titre y voir un moyen au service du retour sur investissement de la formation. Cependant, tout savoir - temps de connexion, taux de réussite, faiblesses des apprenants… - n’a pas grand sens, et peut être risqué (les instances représentatives du personnel veillent).

Enseignements : définir des KPI (indicateurs de  performance) avant le lancement du dispositif digital learning. Que voulons-nous savoir et dans quel but ? Trop de data tuent la data.

“Adieu le présentiel, bonjour le full digital !’’

Combien de managers rêvent de s’affranchir de l’indisponibilité du formateur et des coûts associés, combien rêvent de faire gagner du temps à leurs collaborateurs ? La digitalisation des contenus a de quoi donner des sueurs froides aux formateurs. Mais la menace n’est aussi grande qu’on le croit parfois : seulement 7% des entreprises ont digitalisé totalement leur formation en 2016, contre 5% en 2015 (source : ISTF, 2018). Cependant, elles sont majoritaires à associer présentiel et digital (58% en 2017 Vs. 53% un an auparavant).
 
Enseignements : le métier de formateur a encore de beaux jours devant lui ! Mais il se transforme. On s’appuie sur le digital pour mieux faire passer des messages, relancer l’attention, stimuler ou homogénéiser les pré-requis, rester en contact, accompagner. Le formateur est plus que jamais médiateur de son contenu.