13 octobre 2016, une date importante dans l’univers du jeu : celle du lancement de la Playstation VR (Virtual Reality) pour la console de Sony. Quel potentiel pour le Serious Gaming ? C’est ce que nous avons alors souhaité tester, en commençant par la compilation « Playstation VR Worlds », en particulier le titre « Ocean Descent » qui nous invite à l’exploration des profondeurs océaniques…
Protégé par une cage, je descends lentement dans les profondeurs tout à ma contemplation des paysages aquatiques. Dès ce moment l'immersion (dans tous les sens du terme) est au rendez-vous : bancs de poissons multicolores, crustacés, raies majestueuses… l’impression d’être dans Vingt mille lieues sous les mers. Et d’imaginer en quoi l’approche pédagogique pourrait en être enrichie : faire découvrir les fonds marins de manière interactive à des apprenants affranchis des contraintes liées à des équipements de plongée ! Cependant, si le voyage a commencé dans une ambiance détendue, les commentaires plus anxiogènes au fur et à mesure de la descente, cette tension dramatique préparant l’explorateur au surgissement du grand requin blanc (annoncé sur la jaquette du jeu), alors que le joueur est plongé dans l’obscurité des abysses. Ni une ni deux : le squale aux yeux vides se jette sur la cage pour lui arracher ses barreaux un à un, et en détruire finalement tout un panneau. Perspective effrayante : le joueur va être dévoré par l’affamé qui finit en effet par s'engouffrer dans la cage… avant d’être neutralisé par la chute opportune d’un rocher ! Tout est bien qui finit bien. Jeu testé avec Véronique (la quarantaine, mère de famille), observation de la façon dont elle vit l’expérience « avec son corps » : détendue d’abord quand elle explorait les lieux, puis recroquevillée sur son canapé pour se protéger du prédateur ! Cette expérience met en lumière l'importance du corps et son implication dans une séquence de réalité virtuelle. Au contraire de nous couper du réel, cette expérience donne, semble-t-il, encore plus d'importance au corps qu’un classique jeu vidéo mobilisant l'écran traditionnel avec une manette de jeu ou l’association clavier-souris.
Leçon pour le Serious Gaming
Quelle application concrète la Réalité Virtuelle pourrait-elle apporter au Serious Gaming ? Prenons l’exemple de SnowWorld, un jeu créé par l’université de Washington en 2011 et destiné aux grands brûlés. Pendant que des soins leur sont prodigués, les patients s'amusent dans un monde virtuel enneigé à lancer des boules de neige sur des pingouins. L’efficacité analgésique du jeu n’est plus à démontrer : l’attention du patient est détournée ; il évite de trop penser à la douleur ; il semble, d’après des études scientifiques, que jeu soit plus efficace que la morphine pour soulager ce type de souffrance.
Retour au requin et au « repli » émotionnel de Véronique au fond de son canapé : une réaction de peur, qu’elle commente : « Certains utilisateurs pourraient avoir un crise crises cardiaque avec un casque pareil ! ». Dans le cadre d’un apprentissage via de la réalité virtuelle, il s’agira donc de bien gérer l’intensité des émotions afin d’en éviter des contre-effets. Mais il faudra aussi prendre en compte la capacité qu’ont les émotions d’être source d’apprentissage, comme le rappelle Isabelle Puezzo à partir des travaux de Bandura : « La perception que l’apprenant a de ses émotions et des manifestations physiologiques qui en découlent, a une influence très forte sur l’apprentissage et la réussite scolaire (Bandura, 1997/2007) ».
On est ainsi invité à explorer le fort potentiel pédagogique du Serious Game associé à la réalité virtuelle. Avec la démocratisation des vision-casques comme la Playstation VR, une nouvelle forme d’apprentissage est désormais à notre portée. Il faut s’attendre à ce que la nouvelle année nous apporte les premiers retours d’expérience de formateurs ou d’enseignants prêts à tenter l’expérience avec leurs apprenants. En ce sens, 2017 s’ouvre d’ores et déjà sous de passionnants auspices !
Meilleurs vœux !
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